Entretien avec Emmanuelle Durand (https://www.linkedin.com/in/emmanuelle-durand-432a1b55/) – anthropologue et autrice de “L’envers des fripes”, paru en 2024 chez Premier Parallèle (https://www.linkedin.com/company/premier-parall%C3%A8le/) , une enquête ethnographique sur l’industrie mondialisée du vêtement usagé par Lou Herrmann.
“On a longtemps rapiécé, rafistolé, et donc porté des vêtements usagés. L’opposition binaire neuf/usagé est une construction sociale et historique. (…) Aujourd’hui on a un renversement de ces gestes, qui deviennent des outils de la transition écologique. On les institutionnalise et on leur redonne une forme de valeur sociale.”
“Les associations se retrouvent face au défi de gérer non seulement une quantité grandissante de vêtements, mais aussi des vêtements de moins en moins bonne qualité. On est passé du don au débarras. C’est aussi le symptôme de la baisse de qualité considérable de la production textile qui se fait à 90% avec des matières synthétiques qui ne durent pas. On se retrouve avec ces filières de fripe qui déguisent en fait des formes de déchets.”
“Fétichiser la marchandise, c’est-à-dire dissimuler les rapports de pouvoir, les relations hiérarchiques qui se jouent au sein de cette filière et y apposer un vernis tout vert, et un peu uniforme.”
“On est sur une économie reproductive certes, mais dans reproductif il y a avant tout productif. Et moi ce qui m’intéressait c’était de montrer qui sont ces personnes qui produisent la fripe.”
“Les marchés de la seconde main accueillent ces vêtements défectueux surnuméraires, ce qui ouvre la possibilité à l’industrie textile de ne pas s’occuper de ses déchets.”