Enseignement 2023-2024 : L’universalisme des Lumières : débats et controverses
Cours du 18 mars 2024 : Un droit à la différence ? La Révolution française et les Juifs
Professeur : Antoine Lilti
Chaire Histoire des Lumières, XVIIIe-XXIe siècle
La panthéonisation de l’abbé Grégoire, en 1989, aux côtés de Monge et Condorcet, a suscité des débats inattendus qui portaient non seulement sur son activité de prêtre rallié à la Constitution civile du Clergé, mais aussi sur son rôle dans l’émancipation des Juifs. Jusque-là, Grégoire était resté, dans la mémoire collective, comme un grand promoteur de l’émancipation, notamment avec son Essai sur la régénération physique, morale et politique des Juifs, publié à la veille de la Révolution. C’est à ce titre, notamment, que Robert Badinter, après avoir préfacé une réédition de l’Essai, en 1988, a fermement soutenu l’entrée de Grégoire au Panthéon. Toutefois, d’autres voix rappelèrent que le texte de Grégoire était pour le moins ambigu et que certains passages reprenaient les pires stéréotypes hostiles aux Juifs.
Lire la suite : https://www.college-de-france.fr/fr/agenda/cours/universalisme-des-lumieres-debats-et-controverses/un-droit-la-difference-la-revolution-francaise-et-les-juifs
Retrouvez les enregistrements audios et vidéos du cycle :
https://www.college-de-france.fr/fr/agenda/cours/universalisme-des-lumieres-debats-et-controverses
Tous les enseignements du Pr Antoine Lilti :
https://www.college-de-france.fr/chaire/antoine-lilti-histoire-des-lumieres-xviiie-xxie-siecle-chaire-statutaire
Le Collège de France est une institution de recherche fondamentale dans tous les domaines de la connaissance et un lieu de diffusion du « savoir en train de se faire » ouvert à tous.
Les cours, séminaires, colloques sont enregistrés puis mis à disposition du public sur le site internet du Collège de France.
Découvrez toutes les ressources du Collège de France :
https://www.college-de-france.fr
Suivez-nous sur :
Facebook : https://www.facebook.com/College.de.France
Instagram : https://www.instagram.com/collegedefrance
X (ex-Twitter) : https://twitter.com/cdf1530
LinkedIn : https://fr.linkedin.com/company/collègedefrance
[Musique] [Applaudissements] bonjour à toutes bonjour à tous la semaine dernière après la séance j’ai discuté comme j’aime bien le faire avec avec certains et certaines d’entre vous et l’un d’entre vous m’a fait la remarque suivante ce Sylvain maréchal m’a-t-il dit avec son son projet pour interdire aux femmes d’apprendre à lire
Il me fait un peu penser au taliban alors vous savez que je ne suis pas ennemi des allers-retours entre le passé et le présent et par conséquent le commentaire m’a interpellé d’autant qu’à première vu euh rien n’est plus éloigné des talibans que Sylvain maréchal écrivain até anticlérical
Hostile à la peine de mort et à la violence politique personnage semble-t-il assez doux et inoffensif si on en croit sa biographe Erik Manucci dont je vous avais parlé la dernière fois de plus comme nous l’avons vu il est tout à fait possible qu’il soit entré une bonne part de provocation et
De plaisanterie dans le texte de Sylvain maréchal qui par ailleurs a aussi écrit au même moment un éloge de la romancière Gacon du four dont il était proche or les talibans ne sont pas réputés pour leur sens de l’humour ni pour leur amitié avec des autrices féministe il faut donc a priori rejeter
La comparaison non seulement parce qu’elle est anachronique mais parce qu’elle rapproche des positions dont les fondements philosophiques idéologiques et politiques sont très éloignés et pourtant et pourtant je comprends je comprends cette réaction car si plaisanterie il y a d’une part elle est d’assez mauvais d’assez mauvais goût et pour le reste les positions
Philosophiques et politiques de maréchal en faveur de l’égalité sociale et de la paix ne l’exonère en rien elle prouve surtout que la haine du savoir et du pouvoir féminin la volonté de maintenir les femmes dans l’espace domestique et de leur interdire l’accès à l’espace public n’est pas comme on
Pourrait être tenté de le croire aujourd’hui le seul fait des fondamentalismes religieux mais qu’elle traverse des courants politiques très différents j’avais cité la semaine dernière vous vous en souvenez Michel Perro qui insisté sur les contradictions du mouvement ouvrier et socialiste du 19e siècle et vous savez par exemple à
Quel point une figure comme proudon théoricien emblématique de l’émancip pass a écrit aussi des textes terribles de misogynie il faut donc tenir les deux éléments en tant qu’historien et historienne nous devons contextualiser des textes comme celui de Sylvain maréchal chercher à les comprendre et non à les juger évaluer les conditions
Dans lesquelles il ils ont été publiés et reçus et dans le même temps ne pas se contenter de renvoyer dans un passé idé logique révolue comme si la domination masculine avait était terminé alors qu’elle passe encore et toujours dans de nombreuses régions du monde par une guerre menée contre l’éducation des
Filles si bien que après cette discussion je me suis fait le reproche de n’avoir pas rappelé ce point évident aujourd’hui dans le monde le combat pour l’éducation des filles est encore à mener je pense bien donc au sort atroce des femmes afghanes mais aussi au Pakistan voisin au combat
Courageux de Malala youafsay récompensé par le prix Nobel de la paix en 2014 et plus généralement plus généralement un rapport de l’UNESCO de 2021 montre que 132 millions de filles âgées de 6 à 17 ans sont privé d’école ce qui s’explique par la pauvreté la ruralité mais aussi
Par les mariages forcés le travail obligatoire et par les préjugés religieux culturels ou politiques hostile à l’éducation des femmes l’autre leçon à tirer je crois c’est que l’universalisme n’est pas un bloc ce serait trop facile nous avons vu que CLUD unakaris clot qui plaidait pour un universalisme cosmopolite radical
Sans frontières ouvert à tous les étrangers n’avait guerre soutenu les droits des libres de couleur sans parler de ce des à l’inverse l’abbé Grégoire qui se moquait de ses chimères vous vous souvenez céit le coup de la pierre philosophale et bien l’abbé Grégoire a été un défenseur acharné de la cause des
Noirs et jusqu’à la fin de sa vie restant en correspondance avec les dirigeants d’Haïti indépendants et et bien et bien ce même Grégoire ce même Grégoire était ouvertement hostile au droits politiques des femmes et n’a jamais varié sur ce point je me dis d’ailleurs que si la campagne
Pour faire rentrer Olympe de gouge au Panthéon finit par aboutir on pourrait penser qu’ils auraient tous les deux des discussions assez animées car Henri Grégoire lui est bien entré au panthéon 1989 à l’occasion des cérémonies du bicentenaire en même temps que condoré et Monge ce qu’on oublie toutefois c’est
Que cette décision a suscité de vives débats R pantéonisation provoqua autant de polémique que celle de l’abbé Grégoire comme l’écrivent Paul et Frédéric et Caroline chopelin non pas je vous rassure à cause de ces positions hostiles aux femmes qui n’ont guerre été mentionné à cette occasion mais pour
Deux raisons son engagement en faveur de la Constitution civile du clerger et sa politique à l’égard des juif la première question a profondément divisé le clergé catholique celui été partagé de manière générale sur l’opportunité de s’associer aux commémorations de la révolution qui restait attaché au souvenir des persécutions vécues par le clerger
Réfractaire et une partie des fidèles dans ce contexte l’Église de France a réagit très froidement à la décision de faire entrer Grégoire au Panthéon par exemple le le cardinal de Courtray qui é l’archevêque de Lyon affirma je cite que la soumission au pouvoir civil même dans les conditions de l’époque
Jette une ombre sur la grandeur réelle de ce prêtre et il n’hésita pas à comparer défavorablement Grégoire au prêtres chinois persécutés par le régime communiste encore un anachronisme douteux en réalité l’église était loin d’être unanime comme l’a montré Bertrand Bernard plongeron dans un article rétrospectif publié dans la revue
D’histoire de l’Église de France plongeron lui-même c’est intéressant avait été un acteur de cette histoire à la fois historien et prêtre spécialiste des liens entre philosophie et religion au 18e siècle auteur cette même année 1989 d’un essai sur Grégoire sous-titré l’arche de la fraternité qui insistait sur la dimension religieuse dans
L’engagement révolutionnaire de Grégoire si l’église était divisée la communauté juive l’était tout autant ou plutôt la pantéonisation de Grégoire fut l’occasion de faire entendre des voix divergentes critiques car jusque-l depuis le 19e siècle Grégoire était resté dans la mémoire collective des Juifs français comme la grande figure de
L’émancipation celui qui dès avant dès avant la Révolution avait plaidé pour la fin des persécutions dont les Juifs étaient victimes puis avaient mené à l’Assemblée le combat pour leur accès à la citoyenneté en octobre 1789 dans un article de 1976 intitulé La Révolution française et les Juifs le grand historien de la
Révolution Jacques gotcho lui-même originaire d’une famille juive Lorine rappelle un souvenir d’enfance quand il avait 5 ou 6 ans à Luneville au début du siècle sa mère l’emmenait promené place des Carmes apercevant une statue il demanda qui elle représentait c’est la baé Grégoire un homme à qui nous devons
D’être ce que nous sommes lui répondit dit sa mère avec émotion ce rôle de Grégoire a sans doute été un des arguments qui ont conduit à sa panthéonisation en 1988 un an avant le bicentenaire son Essai sur la régénération physique morale et politique des Juifs publié de
Siècles plusut tôt à la veille de la Révolution avait fait l’objet d’une double réédition l’une préfacée par ritaer montbellot l’autre par Robert Badinter ce dernier qui consacra l’année suivante un essai vibrant à l’émancipation des Juifs sous la Révolution intitulé libres et égau se montrara un défenseur infatigable de
Grégoire et de ses combats et je suis content d’avoir l’occasion dans un cours sur l’universalisme d’évoquer la mémoire de cette grande figure morale et politique de la France contemporaine qui nous a quitté il y a un mois et qui est peut-être appelé à rejoindre Grégoire au Panthéon mais cette publication de
L’essai sur la de la de l’essai de la sur la régénération des Juifs eut aussi pour effet paradoxal inattendu d’attirer l’attention sur des passages très troublants de l’essai de Grégoire contenant notamment tous les stéréotypes et reprenant tous les stéréotypes de l’antijudaïsme je vais revenir dans un instant du côté des intellectuels juifs
Certains en profitèrent pour déboulonner la statue de Grégoire je parle de façon figurée par exemple Pierre banbaum spécialiste de l’histoire politique du judaïsme publia un article dans le débat en 1989 dans lequel il reprochait à Grégoire de n’avoir défendu les Juifs que pour les convertir sans respect pour
Leurs coutumes et leurs pratiqu pour lesquelles il n’avaent que mépris il allait jusqu’à comparer Grégoire à Étienne Brumont la grande figure de l’antisémitisme du 19e siècle auteur de la France juive qui lui-même il est vrai avait cité Grégoire comparant leur jugement critique sur les Juifs il écrivait avec un goût certain de la
Provocation on pourrait croire on pourrait presque dire pardon on pourrait presque dire que le constat de l’abbé Grégoire l’émancipateur et celui de Drumont l’antisémite acharnés sont presque identiques seules les solutions diffèrent il fut rejoint par Anik rgel qui dans le Figaro regretta le choix de Grégoire pour le Panthéon ce qui
Conduisit Badinter à monter à nouveau au créneau pour défendre la mémoire de l’abbé révolutionnaire son argument principal était le suivant les passages incriminés de l’esser sur la régénération ne devait pas être lu de façon anachronique à partir de l’expérience du 20e siècle en y projetant les sensibilités contemporaines il fallait les expliquer
Historiquement comme des concessions au lieu commun de l’époque très largement partagées l’important était la façon don grgoire avait su dépasser ses préjugés si répandus pour promouvoir l’émancipation des Juifs d’abord en 1788 puis plus nettement encore sous la Révolution replacé dans son contexte l’ouvrage de Grégoire devait donc être
Lu comme un geste généreux de tolérance et comme l’annonce de l’accès à la citoyenneté mais au fond la controverse portait plus profondément sur les effets de l’émancipation là je fais une parenthèse je dis l’émancipation c’estàdire l’accès des Juifs à la citoyenneté le terme en réalité n’était pas utilisé sous la Révolution il s’est
Imposé à partir des années 1830 mais il est devenu le terme de de l’historiographie donc je je le reprends tout en précisant effectiv ement que le terme n’est pas utilisé en ce sens dans les débats de la Révolution là où Badinter fidèle à la tradition majoritaire du judaïsme français saluer
Le geste proprement révolutionnaire par lequel la Révolution avait fait des Juifs des citoyens à part entière à la fois libres et égaux Birnbaum et d’autres soulign plutôt que l’émancipation avait imposé aux Juifs le fait d’abandonner leur spécificités leur culture et leur rit l’émancipation à leurs yeux n’avait pas été une
Libération mais plutôt un marché la citoyenneté contre la promesse de se fondre dans la masse nationale contre la la citoyenneté contre l’abandon de toute spécificité la conception que les révolutionnaires avaient de l’égalité des droits impliquait d’effacer toute différence comme avait écrit déjà quelques années auparavant 1982 le sociologue et philosophe schmel Trigano
Dans un essai provocateur sur la République et les Juifs ceci c’était retrouvé aotage de l’universel obligé de donner toujours de nouvelles preuves d’attachement à la France au point de renoncer à leur culture et à leurs traditions alors pour comprendre ces débats pour une certaine manière les mettre en perspective et bien il faut
Revenir aux enjeux des années 1780 20 et au fameux concours de l’Académie de MESS à l’occasion duquel Grégoire a rédigé donc ce cet essai publié en 1700 enfin rédigé en 1788 et publié l’année suivante les concours académiques étaient alors une une institution importante fondamentale même de la vie intellectuelle dans l’Europe des
Lumières et tout particulièrement en France qui disposait à la fin du 18e siècle d’un maillage important danse d’académie provinciale et de sociétés littéraire Jérémy Caradona qui a fait une étude systématique de ces concours en a recensé plus de 2300 entre entre 1670 et 1796 organisé par une cinquantaine de
Sociétés savantes pour un total de 15000 participants la question qui fut proposée en 1700 dès 1785 par la académie de mes ou plus exactement par la Société royale des arts et des lettres de mes portait un intitulé qui peut semblit étrange est-il des moyens de rendre les Juifs plus
Utiles et plus heureux la question s’inscrivait dans un contexte intellectuel favorable à une révision des attitudes traditionnelles des à l’égard des Juifs qui avaient été marqué tout au long du 18e siècle par une hostilité manifeste les philosophes des Lumières à quelques exceptions près notamment montesquieux et Rousseau c’était montré
Dans l’ensemble très critique à l’égard des Juifs alors le cas le plus connu vous le savez c’est celui de Voltaire presque emblématique je ne vais pas le développer aujourd’hui mais je rappelle que ces critiques envers les Juifs étaient envers les Juifs étaient presque obsessionnel et ne se réduisait pas
Comme on l’a souvent dit à une critique de l’Ancien Testament à travers laquelle il aurait visé en réalité le christianisme alors il est vrai que les anciens Hébreux étaai la cible principale de sa verve mais les Juifs contemporains ne trouvaient pas d’avantage grâce à ses yeux ils apparaissaient il lui
Apparaissaient comme les figures mêmes de la résistance aux lumièr de l’obstination à persévérer dans la superstition bref comme le peuple impossible à éclairer et à civiliser si bien que Voltaire était au fond en permanence partagé entre sa condamnation des persécutions dont les Juifs étaient victimes parce que quand même c’est
Voltaire et sa conviction que ceuxci formaiit un peuple méprisable incapable de tout progrès moral et politique cette hostilité d’ailleurs était déjà bien connu de son temps et par exemple un des participants au concours de 787 l’avocat Claude Antoine ti lui reprocha d’avoir je cite prostitué son génie au plaisir
Singulier de dégrader et d’avilir les Juifs si l’antijudaïsme de Voltaire était extrême et reconnu il n’était malheureusement pas isolé au milieu du 18e siècle comme l’a montré par exemple Ronald Chester dans son livre obstinate Hebrews don vous avez la la référence ici au début des années 1780 toutefois les choses commencèrent à changer
D’abord dans le monde allemand en Autriche en 1782 Joseph II élargit l’empereur élargit aux Juifs les bénéfices de l’IT de tolérance de l’année précédente si bien que les restrictions que l’Église faisait traditionnellement peser sur eux furent supprimé en Allemagne quelques philosophes juifs comme Moses Mendelson participai au débats intellectuel de
Leur temps et prenez une amélioration du statut des Juifs vous vous souvenez nous avons déjà évoqué Moses Mendelson qui était le modèle du Nathan le Sage de Lessing de son ami Lessing d’ailleurs la pièce rédigé en 1779 et joué pour la première fois en 1782 s’inscrivait exactement dans le contexte de ces
Débats en 1781 un haut fonctionnaire prussien professeur de finances publies très proche des milieux éclairés berlinois lui aussi ami de Mendelson qui s’appelait Christian vilelm dolm publia un essai important sur la réforme politique des Juifs qui fut traduit immédiatement en français en 1782 il proposer l’accès des Juifs à
L’égalité civile et réfutter la plupart des préjugés à leur égard en 1787 mIRABO popularisa ses idées dans son grand dans son livre qui s intitulé Sur Moses Mendelson et sur la réforme politique des Juifs VO je dis popularisa ses idées c’est bon c’est une manière aimable de dire qu’il l’a allègrement
Pillé hein bon mais à l’époque la frontière était pas si net on va dire quoi qu’il en soit l’heure était à la tolérance la la preuve c’est que notre ami anacarzis clots qui n s’était pas encore fait un prénom donc qui s’appelait encore Jean-Baptiste publia lui aussi un ouvrage appelant à la
Tolérance sobrement intitulé sur les Juifs pendant ce temps Louis XV lui-même demandait à malzerbe de travailler à un projet des dit de tolérance à l’égard des non catholiques finalement ça ne concernera que les protestants mais quand même bien sûr tout cela ne faisait pas taire les voix hostiles qui perpétuaient les arguments traditionnels
Contre les Juifs parfois avec beaucoup de véhément d’autant plus de véhémence qu’il sentait le vent tourner mais cela semblait néanmoins annoncer une ère de tolérance et c’est dans ce contexte que l’Académie de mes mis au concours la question de l’utilité et du bonheur des Juifs alors
Vous allez me dire pourquoi mess bien il y vivait une communauté juive assez importante 2 à 3000 personnes et je vous rappelle de toute façon que les Juifs en France étaient très peu nombreux au 18e siècle à la veille de la Révolution on estime environ 40000 peut-être un tout
Petit peu plus mais de toute façon pas plus de 50000 soit à peine 0,2 % de la population ils étaient d’ailleurs répartis en deux groupes très différents dans le sud une communauté de juif dit portugais à Bordeaux et à Bayonne venu en France couvert de conversion au christianisme mais dont le judaïme était
Tacitement reconnu et qui était bien intégré à la vie marchande et même sociale on peut y ajouter les Juifs d’Avignon et du contat vénessin qui vivaient là depuis plusieurs siècles à l’est en revanche les Juifs d’Alsace environ 20000 personnes qui étaient interdit de résidence dans les villes
Vivent dans les villages et ceux de laorine vivaient eux dans des communautés traditionnelles respectant scrupuleusement les rit parlant yidich pratiquant une stricte andogamie et c’est surtout à eux que pensai les organisateurs du concours et les participants alors neuf textes furent reçu en 1787 parmi lesquels deux ont été immédiatement rejetés parce qu’il ne
Correspondaiit pas aux idées aux attentes assez libérales des organisateurs en fait il s’agissait de deux panflets très violents à l’égard des Juifs qui affirmit que ceci ne serait jamais utile et que donc il n’y avait aucune raison de les rendre heureux par exemple Louis Nicolas aïcour procureur au parlement de MESS
Proposait tout simplement de tous les déporter en Guyane d’autres textes qui eux furent retenus était plus étrange par exemple celui de doncher un bénédictin de saintavolte qui affirmait que le malheur des Juifs répondait à la providence divine mais qu’il était néanmoins possible de les rendre util grâce disait-il à leur goût pour le
Miel il proposait donc tout bonnement de les contraindre à élever des abeilles des mouches à miel comme il disait à raison de 300 Ruges par famille c’est pas mal quand même et le voilà qui se lance dans de savant calcul pour déterminer le revenu que ces milliers d’établissements répartis dans le
Royaume rapporter à l’état régler la question juive avec du miel suffisait d’y penser deux textes furent remarqués mais non primés l’un de laabille Grégoire et l’autre de claudehenri Tiry donc l’avocat au Parlement de mais dont je vous parlais à l’instant les concurrents furent invités à revoir leur copies et à
Présenter des versions améliorées ils furent quatre à le faire et finalement donc en 1788 l’Académie remit trois prix execo à Grégoire à thri mais aussi un lauréat inattendu un juif polonais sur lequel je vais revenir dans un instant car il était le seul Juif à avoir participé au concours nous disposons aujourd’hui
D’une publication intégrale de tous les texte soumis au concours y compris la première version présentée par Grégoire don d 1787 qui est différente de la version publiée et qui a longtemps été considéré comme perdue jusqu’à ce que elle soit retrouvée à la bibliothèque de mes par Alissa goldstin sepinwall alors qu’elle
Travailler à son livre sur Grégoire dont j’ai parlé il y a de semaines cette édition intégrale et commentée a été donnée par Pierre bbaum en 2017 ce qui lui a permis de revenir 20 ans plus tard sur la question épineuse de la position de Grégoire en comparant les deux
Versions du texte il montre que celui-ci loin d’avoir adopté des positions plus libérales a au contraire durci ses critiques à l’égard des Juifs ce qui suggère qu’il n’a pas seulement été prisonnier de lieux commun dont il se serait progressivement distancié mais qu’il a clairement chercher à les enfoncer dans l’esprit de
Ces lecteurs ou du moins à s’appuyer dessus alors Grégoire bien sûr commence on va dire par les fondamentaux c’est-à-dire par la critique de l’usure mais il introduit aussi très vite des considérations physiologiques inspiré de de l’avataer il écrit par exemple en général ils ont le visage blafard le nez
Crochu les yeux enfoncés le menton proéminent il s’en prend surtout à leur coutume aux interdits alimentaires qu’ils respectent avec obstination et vous ne serez pas surpris à leur langue il ne veut absolument pas en entendre parler il parle de cet argot ce jargon tu Esco hibraïco rabinique dont se
Servent les Juifs allemands qui n’est intelligible que par eux et ne sert qu’à épaissir l’ignignorance ou à masquer la fourberie quant au talmude il apparaît comme la quintessence de l’obscurantisme je cite un cloac où sont accumulés les délires de l’esprit humain j’arrête là ça nous suffit je crois comment mais je
Il fallait que je les cite parce que ça m’amène à la question comment comprendre de tel passag chez un auteur qui plaide pour mettre fin aux persécutions que les Juifs endurent depuis des siècles car il est tout aussi vrai et c’est même l’aspect essentiel du texte que Grégoire retrace
Longuement et avec empathie l’histoire des malheurs du peuple juif et qu’il dresse un véritable réquisitoire contre le comportement des chrétiens les défauts actuels des Juifs ne leur sont pas imputables affirme-t-il ils sont la conséquence des persécution qui les ont rendu ce qu’ils sont on comprend alors comprend alors que
L’insistance de Grégoire sur ces mêmes défaut et moins une façon d’accabler les juifs comme chez ses adversaires ou de les écarter du progrès et de la civilisation mais au contraire de promouvoir la politique de régénération qu’il propose le terme figure d’ailleurs dans le titre même de l’édition de son
Manuscrit et elle est très présente dans le texte de 1788 dans la 2e version alors qu’elle ne l’était pas ou presque l’année précédente et donc on peut conclure que Grégoire a si amment insisté sur le degré de bassesse auquel les chrétiens ont réduit les Juifs pour mieux prouver la nécessité de changer
Radicalement de politique à leur égard afin de les régénérer l’idéal éclairé de la civilisation c’est-à-dire le progrès des meœurs venait fusionner avec un idéal chrétien de la conversion impliquant une transformation complète et profonde d’un peuple de ces croyances de ses meœurs Grégoire ne parlait pas ouvertement de conversion et surtout pas de conversion
Forcée mais laisser planer à plusieurs reprises cette perspective et ce raisonnement évidemment avait une conséquence si la tolérance et l’égalité étaient les objectifs à atteindre il ne pouvait pas l’être dans l’immédiat il ne serait que le résultat à venir de la politique de régénération Grégoire ainsi d’ailleurs que d’autres candidats
Imaginit toute une série de mesures destinées à arracher les Juifs à leur destin il s’agissait de les soustraire bien sûr à l’influence des rabins de les détourner de leur croyan traditionnell irrationnell et surtout de leur interdire l’usure et le commerce en les obligeant à travailler la terre ce dernier point est extrêmement important
Pour Grégoire la régénération des Juifs passe nécessairement par la terre il fallait en faire des paysans des cultivateurs il faut remarquer que c’est une position très différente de celle qu’avait défendu les rares auteurs libéraux favorables aux Juifs par exemple John Toland en Angleterre au début du siècle qui insisté plutôt sur
L’utilité commerciale des Juifs pour Grégoire en revanche rendre les Juifs utiles et heureux impliqué de les changer radicalement ce qu’il résumait ainsi nous avons établi le danger de les tolérer tel qu’ils sont la nécessité de les réformer et la possibilité d’y parvenir mélange de tolérance et d’intolérance de générosité et de
Paternalisme qui constituait ce que Alissa et pinwall appelle le paradoxe de la régénération la conclusion de Grégoire néanmoins mérite d’être signalé était entièrement tourné vers la condamnation des persécutions et l’annonce d’une espérance c’està-dire quand je dis sa conclusion vraiment les dernier paragraphe du texte et elle fit beaucoup
Hein pour sa postérité et donc je vous la mets aux nations depuis 18 sièclle vous foulez les débris d’Israël la fureur de vos pères a choisi ses victimes dans ce troupeau désolé quel traitement réservez-vous aux agneaux timides échapper du carnage et réfugi dans vos bras un siècle nouveau va s’ouvrir
Les Juifs sont membres de cette famille universelle qui doit établir la fraternité entre tous les peuples et sur eux comme sur vous la révélation étant son voile majestueux enfant du même père dérobé tout prétexte à l’aversion de vos frères qui seront un jour réunis dans le même berkaaille je vous lis pas tout
Vous avez la la citation ici et qu’enfin le Juif accordant au chrétien un retour de tendresse embrasse en moi son cito son citoyen et ami al voyez comment Grégoire mèle une éloquence chrétienne traversée par le langage du pouvoir pastoral et celui de la révélation avec le discours humanitaire de la tolérance propre
Lumière cette conclusion qui semble annoncer la révolution à venir ne doit toutefois pas conduire à négliger les ambigués du texte ou la régénération des Juifs apparaît comme un préalable à leur entrée dans la grande fraternité humaine régénération qu’il n’est pas difficile de lire comme un programme d’assimilation sinon de conversion comme
L’écrit encore Grégoire à force d’encourager les Juifs insensiblement ils adopteront notre manière de penser et d’agir nos lois nos usages et nos meurs alors sur ce plan il est instructif de comparer le texte de Grégoire à celui de zalkin ourvitz qui est le grand oublier en général des travaux sur
L’émancipation sa présence dans le concours est déjà un fait notable qui était zalkin Vitz et bien c’était un juif polonais né dans un village près de Lublin en 1750 arrivé à Paris dans les années 1770 installé dans le quartier Saint-Martin là où habitait les quelques juifs d’origine allemande qui comptaaiit
Que comptaaiit la capitale il vivait pauvrement de son métier de colporteur mais lisait beaucoup et développa une vraie culture d’autodidacte en commençant à écrire dans quelques journaux comme Le de l’Europe il a fait l’objet d’une enquête minutieuse de l’historienne américaine Frances Malino paru en 1996 et traduit
En 2000 un juif Rebel dans la Révolution et sous l’Empire qui suit ourvitz jusqu’à sa mort misérable dans une mansarde de la rue des vieux Augustins en 1812 mais al revenons à 1788 dans la préface ajouté à son manus rit pour la publication wiitz explicite sa position il était absolument nécessaire écrit-il qu’un
Juif participa au concours pour défendre ses coreligionnaires contre les reproches qui leur étaient fait or son avantage à lui Vitz écrit-il c’était d’avoir très peu de lien voire aucun avec la communauté juive et de vivre à Paris absolument isolé ce qui dit-il assuré son impartialité impartialité c’est son terme aussi écrit-il on verra
Que je parle plus en homme qu’en juif c’est toute l’ambigué pas si différente des paradoxes que nous avons évoqué la semaine dernière ourvitz doit parler en tant que juif pour défendre les siens et en tant qu’homme pour échapper au danger de partialité son texte par ailleurs est passionnant Vitz fait étalage d’une érudition
D’autodidacte mais surtout d’un humour ironique ravageur très éloigné de l’éloquence religieuse de Grégoire il commence par exemple par noter c’est une des toutes premières phrases qu’il est quand même étrange de proposer la question telle qu’elle a été formulée il écrit à sa lecture il me sembla entendre Charles Lequin ordonner des prières
Publiques pour la délivrance du pape que lui-même tenait assiégé le moyen de rendre les Juifs utiles et heureux le voici c’est c’est de les rendre mal mal heureux et inutile en leur en leur accordant ou plutôt en leur rendant le droit de citoyens dont vous les avez privés contre toutes les
Lois divines et humaines et contre vos propres intérêts et il citait Jonathan Swift nous sommes fort éclairés pour faire du mal mais pas assez pour faire du bien alors voyez le ton est donné bien plus direct que celui de Grégoire et des autres concurrents et ourvitz ne va guerre en
Varier certainement déiste il est très critique à l’égard des rabins de leur autorité mais le point essentiel c’est qu’il réfute toutes les critiques traditionnelles adressées aux Juifs y compris donc par Grégoire il écrit par exemple les Juifs n’ont point d’autre préjugés que celui qui est commun à toutes les nations c’est-à-dire de
Préférer leur religion aux autres il propose donc de leur accorder l’égalité s sans leur imposer de contraintes excessives et notamment c’est ça qui m’intéresse il rejette toute idée de régénération et là encore avec une verve que je trouve assez réjouissante tant qu’il ne sera pas prouvé que les Juifs
Sont vraiment dégénérés je ne vois point la nécessité ni même la possibilité de les régénérer à moins qu’on ne prenne pour une preuve de dégénération les petites représailles dont la nécessité les oblige d’user envers leurs injustes ennemis qui sans provocation les oppriment les détestent les mépris et pousse l’injustice jusqu’à prendre leur
Représaill pour des agressions ce ne sont donc pas les Juifs mais les chrétiens qu’il faudrait régénérer et rendre juste et humain envers les premiers vit ne croyait pas si bien dire un an plus tard la révolution éclaté créant un contexte politique totalement nouveau dominé par la Déclaration des Droits de
L’Homme et la souveraineté de la nation quelle place les Juifs allait-il occupé dans cette nouvelle société pouvait-il aspirer à bénéficier des droits des citoyens comme nous l’avons vu à plusieurs reprises la Déclaration des droits de l’homme avait posé un principe celui de l’égalité encore fallait-il établir précisément qui pouvait
Revendiquer ses droits de fait les Juifs de Paris s’empressèrent d’envoyer une délégation à l’Assemblée pour plaider leur cause dès le 26 août il nétait pas très nombreux hein c’est 500 600 personnes en décembre un grand débat s’ouvrit à l’Assemblée Grégoire lança l’offensive avec une motion en faveur des Juifs qui semblait
Reprendre à peu près l’argumentaire de l’année précédente les Juifs ne sont ce qu’ils sont qu’en raison des persécutions qu’ils subissent il faut donc leur donner des droits égaux et les orienter vers d’autres métiers que le commerce mais en réalité le texte était très sensiblement différent les critiques avaent presque disparu par exemple les
Spécificités alimentaires n’étaient plus considéré comme un problème qu’importe à la tranquillité politique cette différence diététique écrivait maintenant grigoire et si le terme le thème de la régénération restait présent Grégoire n’insistait plus sur le préalable d’une transformation profonde désormais il se situe au niveau des principe ceux de l’égalité des droits en
Tant commomme les Juifs ont le droit à l’égalité c’est leur entrée dans la nouvelle société nationale qui les chargera de qui se chargera de les régénérer voyez la logique est inversé si bien que les mesures coercitives évoquées dans le discours de 1788 sont désormais abandonnées Grégoire toutefois semble encore hésiter entre l’affirmation de
L’égalité et le discours de la régénération un autre orateur va nettement plus loin développant de façon conséquente le discours universaliste des droits c’est un noble libéral partisan d’une monarchie constitutionnelle des premiers nobles rallés à la Révolution il s’appelle Stanislas de clermontonner le 23 décembre 1789 il plaide avec éloquence
Pour qu’une égalité complète soit accordée aux Juifs une une une une égalité immédiate et sans condition alors c’est un discours très célèbre et on en retient en général une phrase unlassablement cité il faut refuser tout aux Juifs comme nation et accorder tout aux Juifs comme individu et on veut y voir souvent une
Définition de la citoyenneté à la française et même d’un universalisme hostile à toute revendication de différence comme si la révolution en accordant la citoyenneté au Juif les avaent obligé à renoncer à leur identité cette lecture s’est imposée comme un light motif de la mémoire juive de la Révolution soit positivement soit plus
Récemment négativement alors même qu’il s’agit d’une lecture excessive à la limite du contresens comme l’ont montré plusieurs auteurs de façon systématique depuis les années 1980 toute une série d’études qui montrre que cette phrase est tirée du contexte de l’ensemble du discours pour lui faire dire beaucoup
Plus qu’elle ne dit en réalité ce que demande clermontonner c’est que les Juifs renoncent à leur organisation juridico-politique en tant que nation c’est-à-dire au fait d’avoir leur propres juges leur propres loi et de régler leurs affaires entre eux il l’explicite il faut c’est la phrase suivante il faut qu’il ne fasse dans
L’État ni un corps politique ni un ordre ni un corps politique ni un ordre autrement dit qu’ils acceptent les règles politiques issues de la Révolution et manifestent leur volonté d’être français pour le reste aucune condition n’est posée ni en terme de profession d’amélioration morale de réforme culturelle ou linguistique même
Le refus d’épouser des nonjuifs ou de se mêler à eux n’est absolument pas un obstacle claire montonner le dit très clairement quant à leur insociabilité on l’exagère existe-t-elle quand concluez-vous en principe y y a-t-il une loi qui m’oblige à épouser votre fille il y a-t-il une loi qui m’oblige à
Manger du lièvre et en manger avec et à manger avec vous certes c’est travers religieux paraîtront et quand ils survivrai et à la philosophie et au plaisir d’être enfin de vrais citoyens et des hommes sociables ils ne sont pas des délits que la loi puisse et doivent atteindre le discours de clermontener ne
Traduisit donc pas un assimilationniste en joignant aux Juifs de renoncer à leur spécificité culturelle mais au contraire un universalisme pluraliste reconnaissant aux Juifs comme aux autres minorités religieuse un droit à la différence et faisant même de cette différence le signe de la générosité de la nouvelle nation comme y insiste
Maurice Samuels dans un livre dont je vous avais déjà parlé en décembre droit à la différence l’universalisme et les Juifs auquel j’emprunte le titre pour cette séance et je vous signale d’ailleurs comme introduction à son travail si vous voulez un entretien de l’auteur avec margaot renard publié récemment sur le site en ligne
Entreetemps dont l’adresse s’affiche ici un point crucial par ailleurs est souvent oublié en décembre 1789 la proposition de de cler mononner échoue à convaincre les députés on on en parle toujours comme si ça avait abouti pas du tout elle est contrée par de très nombreuses prises de position hostile
Aux Juifs l’abbé Moris figure de la droite de l’Assemblée considère que les Juifs sont des étrangers résidant certes en France mais obéissant à d’autres lois qu’ n’est donc pas question de leur accorder la citoyenneté l’abbé de La l’abbé lafar év de Nancy menace l’assemblée d’émeutes antijuives un décret qui donnerait au Juifs les
Droits de citoyens pourrait allumer un grand incendie par ailleurs ceuxci ne sont pas les seuls concernés loin de là par ces débats qui portent sur d’autres exclus et notamment sur les professions jusque-l considérées comme infamantes le discours de clermener on l’oublie aussi avant d’aborder la question des Juifs
Traiter plus longuement du sort des comédiens et du bourreau ces débats de 1700 de décembre 1789 sont en effet un moment au-delà de la question des Juifs un moment important de définition de l’universalité des droits à l’échelle nationale c’estàdire un moment où il s’agit pour les députés de mettre en
Pratique les de mettre en œuvre les principes d’égalité énoncés au mois d’août à ce titre le cas des des comédiens est très intéressant sous l’Ancien Régime en raison du préjugé infamment attaché à leur métier ils ne bénéficiaient pas de tous les droits civil mais à l’automne 1789 plusieurs brochures plaident pour
Leur accès à la citoyenneté il ne s’agit plus de revendiquer pour eux un statut privilégié dans un cadre corporatiste comme sous l’ancien régime ou encore de défendre leur moralité l’enjeu désormais et leur inclusion dans une société en formation dont aucune partie de la population ne doit être écartée par
Exemple le dramaturge Jean-Louis laaya demande la régénération des comédiens c’est le titre de sa brochure utilisant voyez le vocabulaire révolutionnaire cher agrégoire dans ces courtes réflexion sur l’état des comédiens Marie-Joseph chéier argumente à partir du principe général de l’Universal des droits les comédiens doivent être traités comme tous les autres
Travailleurs salariés de fait le décret adopté le 24 décembre ne mentionne pas spécifiquement les comédiens mais règle la question en supprimant toute discrimination lié à la religion et au métier sauf donc pour les Juifs la société de corps laisse place à une société de citoyens il s’agit d’affirmer une
Égalité citoyenne qui modifie la place accordée au métiers dans l’ordre politique et juridique en mettant à distance les particularismes professionnels écrit Suzanne Rochefort dans un très beau livre qui vient de paraître vie théâtrale consacré aux comédiens et comédiennes parisienne au 18e siècle or dans ce nouvel ordre la
Question des Juifs donc reste en suspens laassemblée a refusé de la trancher de la trancher dès lors c’est chacun pour soi en janvier les Juifs du Sud-Ouest présentent une requête à l’Assemblée demandant à bénéficier de la citoyenneté au nom des droits qui étaient les leurs sous l’Ancien Régime les lettres
Patantes dont ils bénéficiaient et ils veulent surtout pas que leur sort soit associé à celui des Juifs de l’Est ils obtiennent gain cause après un long débat en janvier 90 marqué par l’hostilité de ceux qui craignent que la mesure soit ensuite élargi à tous les Juifs pour les Juifs alsaciens et Laurin
Et pour ce de Paris c’est une déception il ne cesse dans les mois qui suivent de protester de pétitionner zalkin urwiitz de son côté ne désarme pas après le prix qu’il a reçu en 1788 il a publié son apologie pour les Juifs et obtenu un poste d’interprète à la Bibliothèque royale pleinement engagé
Dans la Révolution il écrit dans les journaux continue à plaider pour l’égalité des droits et devinez où on le retrouve en mai 17 0 et bien à l’Assemblée dans la délégation des étrangers mené par l’orateur du genre humain avec qui il s’est lié et où il joue le rôle du
Polonais puis dans les mois qui suivent ourvit continue à combattre pour que l’égalité des droits devienne une réalité associant la destinée des Juifs à celle des libres de couleur il n’a rien perdu bien au contraire vous allez le voir de son ironie et de son mordant
En janvier 1780 11 dans le Journal de Paris il s’insurge contre la pratique des jeux d’argent et contre l’indulgence don dont il bénéficie de la part des autorités et voilà ce qu’il écrit il est étonnant que l’Assemblée nationale a ajourné l’affaire des juifs et des hommes de toutes les couleurs et des
Gens de toutes couleur et de toute religion tandis qu’elle laisse jouir de tous les droits du citoyen les directeurs et les secrétaires perpétuels des académies de jeu pour être citoyen et même législateur dans ce pays de de la liberté il suffit d’être propriétaire d’un prépus blanc et d’avoir autant de
De probité qu’il en faut pour ne pas être pendu c’est ce qu’on pourrait appeler de de l’humour intersectionnel et légèrement transgressif finalement l’accès de tous les Juifs à la citoyenneté est voté le 27 septembre 1791 au moment où l’Assemblée constituante va se séparer la Constitution est terminée elle a été
Adoptée et dans les tous derniers jours au moment de se séparer et bien l’avocat Adrien Duport qui est un des hommes forts du moment demande que les restrictions qui pèsent sur les Juifs soient enfin levées je crois déclare-t-il que la liberté des cultes ne permet plus qu’aucune distinction
Soit mise entre les droits politiques des citoyens à raison de leurs croyances et je crois également que les Juifs ne peuvent pas être seuls exceptés de la jouissance des droits il ne s’agit plus vous le voyez de légiférer sur la spécificité des Juifs mais au contraire de ne pas faire d’exception
Jean-François rebelle député de cololmar au sty juif essaye de désespérément de prendre la parole pour s’y opposer mais on l’en empêche et un autre député proche de Duport demande un vote sans discussion sous prétexte c’est intéressant qu’argumenter contre la proposition serait critiquer la Constitution elle-même comme l’écrit ironiquement Maurice Samuels l’un des
Événements majeurs de l’histoire juive moderne eu lieu grâce à un tour de passe-pe parlementaire sur le fond les Juifs sont moins considérés pour eux-mêmes que pour ce qu’ils représentent pour le symbole du caractère véritablement universel des droits et on peut remarquer aussi que du port vous l’avez entendu met en avant la
Liberté des cultes les Juifs ne sont sont pas envisagés comme un peuple comme une nation mais comme une confession religieuse et cela change tout il n’est plus question de leur caractéristique physique ou morale le processus essentiel consiste au fond à déssethniciser les juif c’est ce qui permet leur inclusion dans la
Nation le thème de la régénération pour autant ne disparaît pas Grégoire lui-même qui d’ailleurs ne se préoccupe plus guère de la question après l’échec de décembre 17 9 reste attaché à cette idée par exemple il écrit un de ses correspondants les Portugais les Avignonnais jouissent de tous les droits de citoyens ceux
D’Alsace et de Lorine pas encore et c’est leur faute ils voudrai conserver leur communauté et une foule d’usage qui heurte le régime de notre gouvernement actuel il faudrait dit-il les fondre dans la masse nationale alors les Juifs eux mêmees de leur côté comment réagissent-ils dans un premier temps plusieurs témoignages
Montrent qu’ ils adhèrent avec enthousiasme à la Révolution et se réjouissent de bénéficier de l’égalité ils participent par exemple à des cérémonies publiques d’allégance à la nation ber Isaac ber qui est le le dirigeant des Juifs de Nancy et qui a joué un rôle important auprès des
Députés vous voyez ici dans un un portrait un peu plus tardif senthousiasme du changement survenu et rassure ses frères en affirmant chacun de nous suivra naturellement la religion de ses pères nous pourrons donc donc est tout à la fois fidèlement attaché à la religion juive et bon citoyens
Français mais la situation néanmoins se durcit sous l’Empire Napoléon pour sa part a une conception plus assimilationniste que les députés de 1791 à tel point que Jacques gotcho dont je vous parlais tout à l’heure voyait un lien direct entre les idées de Grégoire et les projets de Napoléon celui-ci crée
Une assemblée des notables Juifs en 1806 puis un grand saintedrine en 1807ù il s’agit avant tout de contrôler politiquement le judaïsme français mais aussi de réduire les marqueurs de différence par exemple en encourageant les rabins à prêcher en français l’année suivante en 1808 Napoléon prend un décret discrimin un décret
Discriminatoire qu’on a souvent appelé le décret infamme qui ne fut pas renouvelé à la restauration par la ensite au cours du 19e siècle s’est développé là je vais aller très très vite c’est développé ce qu’on a appelé l’israélitisme ou encore le franco-judaïsme c’est-à-dire la volonté des Juifs français d’une grande partie d’entre eux
De s’identifier à la nation ce qui les conduit à se considérer donc comme israélite plutôt que comme juif ce dernier terme restant chargé de connotation négative ce qui n’empêche pas la reconnaissance en parallèle d’une spécificité juif et même le développement d’un véritable philosémitisme comme l’a montré là
Encore Maurice Samuel autour du cas de la comédienne Rachel philix qui triomp à la Comédie française sous la Monarchie de Juillet tout cela bien sûr jusqu’à la crise drefusarde qui révèle au grand jour à la fois la persistance d’un antisémitisme virulent mais aussi ne l’oublions pas à l’inverse l’existence d’un
Républicanisme des droits de l’homme capable de prendre la défense du capitaine juif l’émancipation débouche ainsi sur ou a débouché ainsi sur une nouvelle conception une nouvelle question juive qui peut se formuler ainsi comment restant Ju comment rester juif tout en étant citoyen question que soulève notamment Bernard Lazar qui crée la notion de
Paria conscient que reprendra et élargira anarent que conserver d’une identité proprement juive qui n’est pas seulement une question de Cro mais qui est aussi un ensemble de pratique la fidélité à une histoire à des liens communautaires peut-être même à une position de marginalité assumée hérité de siècles de persécution tout en
Se fondant au mieux dans l’identité républicaine celle de l’adhésion au principe universaliste c’est ce que Bruno carsinti a appelé la question juive des modernes alors cette question juive bien sûr a des spécificité notamment en France en raison de l’Alliance particulière que les Juifs ont noué avec l’État mais aussi elle est aussi bien
Au-delà de la question juive un révélateur des questions plus larges que posait l’universalisme révolutionnaire ces dernières semaines nous avons vu comment l’affirmation de les droit des droits de l’homme et du citoyen malgré la rhtorique et l’ambition universelle s’est heurté au questions c’est heé aux questions de l’inclusion et des frontières de la
Différence et de la régénération avec un mélange d’idéalisme et de cynisme d’enthousiasme cosmopolite et de patriotisme méfiant d’envolet philanthropique et de marchandage politique qu’il s’agisse des étrangers des esclaves des femmes des Juifs les enjeux sont à chaque fois différents mais les problèmes sont en grande partie les mêmes chaque fois nous
Avons retrouvé les mêmes tensions entre l’idéal d’extension illimitée des droits et le principe de clôture de la communauté politique entre l’idéal d’uniformité qui soutient le projet national et l’acceptation des différences qui est l’idéal du pluralisme issu des lumières depuis pierre Bale ce que j’ai voulu vous montrer au
Fond dans ces séances c’est qu’une approche historique permet de sortir des oppositions idéologiques trop tranché comme celle qui oppose les défenseurs et les adversaires de l’universalisme celui-ci et même l’universalisme des lumières n’est pas un bloc dans la pensée des philosophes du 18e siècle nous avons identifié plusieurs langages de l’universel celui
Cosmopolite du droit celui de la civilisation fondé plutôt sur l’histoire et l’imaginaire du progrès des meœurs et celui enfin critique qui oppose au Pr prenstion européenne le d’autres conceptions de l’universel invoquant l’expérience des esclaves noirs celle des parias de l’Inde appelant à l’émancipation voire à la révolte avec la révolution cette
Pluralité de langage persiste mais nous l’avons vu toutes ces dernières semaines elle se politise elle se reconfigure aussi d lors que l’État nation démocratique issue de la Révolution s’affirme comme le nouveau lieu de l’universel celui où se réalise doit se réaliser la promesse moderne de l’émancipation par l’égalité des droits
En cela cet État démocratique et l’héritier bien sûr des langages universalistes des lumières mais il n’en capture pas l’intégralité de l’héritage laissant de côté tout un pan cosmopolite et critique qui ne cessera de le travailler comme un remord par ailleurs ce nouveau paradigme statonational si vous permettez de l’universalisme est
Lui-même loin d’être homogène il suscite un débat sur l’extension des droits et la reconnaissance de la différence comment est-il possible d’être différent mais égau tout au long du 19e siècle ces questions n’ont cessé de se poser à nouveau à travers la lutte pour le suffrage universel pour le droit de vote
Des femmes pour l’abolition de l’esclavage dans les colonies avec la conquête de l’Algérie puis de l’indochchine et des territoires d’Afrique occidentale la question prend un tour nouveau puisque l’affirmation des droits de l’homme en métropole s’accompagne d’une exclusion massive et d’une domination à l’extérieur la question des femmes et
Des juif joue là aussi un rôle important mais plus ambigu dans l’affirmation d’une mission civilisatrice tandis que l’islam devient un enjeu nouveau pour penser l’universalité de la citoyenneté française en contexte colonial d’abord puis en métropole alors vous l’avez compris l’universalisme français n’est pas seulement pluriel il est aussi
Historique il a fait l’objet dès 1789 puis tout au long des deux siècles qui ont suivi d’interprétation et de réinterprétation de débats et de conflits il n’est donc pas un dogme gravé dans le marbre mais un champ polémique et politique en perpétuelle mutation et nous n’avons fait que
Commencer à étudier cette histoire c’est pourquoi vous l’avez compris je poursuivrai l’enquête l’année prochaine avec un ensemble de de séances qui viseront à compléter et à prolonger le cours de cette année en attendant je termine en vous remerciant chaleureusement de vos votre fidélité c’était un plaisir de vous retrouver si
Nombreux tous les lundis et avant de vous quitter quand même je vous signale plusieurs rendez-vous printaniniers parce que on se quitte mais on peut se retrouver on peut se retrouver avant 1 an du 18 au 19 juin un grand colloque sera consacré aux lumières médiatique qui visera à réfléchir aux
Transformations de la communication des médias et de l’espace public au 18e siècle et à leurs effets sur les lumières le programme sera bientôt disponible l’argumentaire est déjà en ligne sur le site du collège auparavant le 14 mai je vous invite à assister à la conférence que donnera Jennifer Pitz professeur à
L’Université de Chicago sur les débats abolitionniste à la veille de la Révolution et notamment sur la traduction en français du premier traité anti-esclavagiste rédigé par un ancien esclave africain les pensées et sentiments d’Oba koguano et le rôle qu’a joué condoré dans cette traduction et vous voyez que nous serons
En plein dans la continuité de ce cours bonne après-midi merci [Applaudissements] beaucoup