Les approches féministes des sciences et des technologies remettent en cause le caractère neutre et universel des savoirs et des innovations. On entend par exemple souvent parler de stéréotypes, et il est courant de chercher à faire évoluer l’image classique (et masculine) de l’expert en tech. Mais au-delà des représentations, comment des biais de genre peuvent-ils façonner la conception ou le fonctionnement même d’une technologie ? Comment des inégalités peuvent-elles se matérialiser dans des services numériques ?

    *A propos du speaker*

    Marion Coville est maître de conférences en Sciences de l’information et de la Communication à l’Université de Poitiers. Ses recherches s’ancrent dans une approche féministe des sciences et des technologies et s’intéressent aux secteurs du jeu vidéo, du travail en ligne, du handicap et de la santé connectée. Elle est responsable du projet de recherche “Flux de sangs, flux de données : explorer les menstrutech” et co-organise le festival Les Menstrueuses.

    [Musique] et merci beaucoup pour l’invitation bonjour à toutes et bonjour à tous euh donc effectivement je suis je suis enseignant chercheur à l’université de Poitier je bosse aussi pas mal dans le milieu associatif je vous raconterai ça à la fin de à la fin de la kyote et côté recherche je m’inscrit effectivement dans des approches dites féministes des sciences et des technologies c’est-à-dire que moi ce qui va m’intéresser c’est vraiment d’essayer de comprendre comment le genre va façonner des connaissances scientifiques des diagnosti des technologies des médias comme agès le souligné j’ai travaillé dans plusieurs secteurs en particulier le jeu vidéo sur lequel j’ai fait j’ai fait toute ma thèse j’ai travaillé aussi sur tout ce qui va être médiation scientifique sur la robotique la santé sur le travail en ligne et effectivement euh maintenant je suis responsable d’un projet de recherche sur les applications de suivi des cycles menstruels en fait je travaille dessus depuis 2018 ça fait déjà 5 ans et bah il se trouve que c’est vraiment un très bon exemple pour vous parler du sujet du genre et des innovations puisque à partir du début des années 2010 on avait des applications de santé généraliste sur nos smartphone dans lesquels il était possible de rentrer énormément de données que ce soit soit notre rythme cardiaque le nombre de pas qu’on avait pu faire dans la journée le nombre de calories qu’on avait ingéré le gramme enfin le nombre de grammes de sell qu’on avait pu ingérer et cetera et cetera l’état de notre transit par contre il y avait un truc qu’on pouvait pas noter c’était la date de nos règles ça ça n’existait pas dans les applications de santé généraliste et en fait il a fallu que des femmes créent des des applications spécifiques sur la question des règles pour qu’on ait des services numériques sur nos smartphones qui permettent d’inscrire la date de nos règles on pense par exemple à aidatin qui a créé la l’application et l’entreprise allemande clou et même une fois qu’elles ont décidé de créer ces applications ça s’est pas fait facilement euh en fait la plupart des personnes qui ont créé des applications de suivi menstruel et des des innovations pour la santé des femmes de manière plus générale raconte généralement que quand elles ont essayé de les faire financer elles ont essuillé beaucoup de refus actuellement je mène une enquête auprès des entrepreneuses de la femtech en France j’ai à nouveau effectivement ce genre de retour où quand elles vont voir des financeurs pour présenter leurs projets qui sont sur la santé des femmes on va leur répondre que finalement leur projet il est trop de niche que il est pas assez c’est rentable que il est pas assez d’envergure moi-même je vous l’ai dit j’ai commencé à travailler sur la question 2018 on est en 2024 je viens seulement d’obtenir un financement pour pouvoir faire ma recherche avant j’étais obligé de la faire sur mon temps libre entre le 15 juillet et le 15 août et globalement quand je présente ce sujet de recherche en dehors de cercle féministe au mieux on va trouver mon sujet de recherche original et rafraîchissant euh au pire j’appelle ça l’effet fébreise euh au mieux au pire en fait on va trouver ça pas intéressant voir dégoûtant euh je pense que mon exemple préféré qui est aussi le plus cocasse c’est la première fois que j’ai fait une communication publique sur les applications de suivi menstruel dans un colloc scientifique entre universitaires je finis ma présentation sur ma ma super enquête dont j’étais trop fière sur les utilisatrices de ces applications sur tout ce que j’avais fait les résultats que j’avais il y a un enseignant chercheur qui a pris la parole qui m’a posé une question qui m’a dit j’ai entendu dire que les femmes étai capable de synchroniser leurs cycle quand elles étaient les unes à côté des autres est-ce que du coup on pourrait envisager que toutes les femmes qui utilise la même application pourrait synchroniser leur cycle alors effectivement si vous avez des contacts chez Netflix je pense que ça peut peut faire un super scénario de film d’horreur par contre en tant que sociologue qui essayit de candidater à des projets de recherche de l’Agence nationale de la recherche c’était pas forcément le sujet qui m’intéressait le plus blague à part malheureusement c’est vraiment arrivé euh les arguments de type c’est un projet de niche c’est pas assez rentable c’est des arguments qui bien évidemment sont faux c’est des arguments qui vont revêtir euh la représentation de la rationalité mais pour essayer de justifier que ce serait un projet qui serait risqué que le retour sur investissement n’est pas assuré c’est pas moi c’est le marché mais en fait tout ça c’est faux c’est-à-dire que si on joue vraiment le jeu de la rationalité et qu’on va aller chercher les chiffres qu’on va aller rechercher dans les statistiques de de l’INC par exemple de savoir combien de personnes sont concernées par les menstruations aujourd’hui dans la population française combien de dépenses de santé sont effectuées par les femmes quel est le taux d’équipement des smartphones du côté de la population féminine tout ça en fait nous donne des chiffres qui bien évidemment nous précisent que une application de suivi smartphone pour suivre ses règles c’est tout sauf une niche sauf si vous arrivez à faire rentrer des dizaines ou des centaines de milliers de personnes dans une niche donc le problème c’est pas la rentabilité donc c’est quoi et en fait c’est là qu’on a besoin du concept de genre pour comprendre en fait où est le problème alors je débarque dans dans un espace où en fait depuis 2 jours on parle déjà du genre on a parlé notamment enfin de on a parl de transidentité on a parlé de non mixité voilà il y a déjà eu pas mal d’apports sur sur ces questionsl donc moi je vais essayer de venir compléter un petit peu tout ça en vous expliquant comment en tant que sociologue en fait on étudie le genre et de vous raconter ensuite comment est-ce que en sociologie de l’innovation on va aller s’intéresser justement aux questions de gen donc je vais commencer quand même par une petite introduction sur c’est quoi le genre juste petite précision le genre n’est pas un synonyme du mot sexe pour faire joli parce que le terme sexe il faut pas le dire et c’est à bout je le vois de plus en plus notamment dans les médias où finalement le mot sexe disparaît au profit du mot genre parce que c’est ça fait plus joli ce sont deux concepts deux termes qui font appel à des choses différentes le genre on peut dire que finalement c’est cet ensemble de valeurs de comportement d’attributs de goût que nous serions censés tous et toutes partagé selon que nous sommes des hommes ou des femmes le genre c’est toutes ces attentes que les autres ont envers nous parce que ils nous ont identifié comme des hommes ou des femmes ce sont les manières dont ils s’adressent à nous parce qu’ils nous ont identifié comme des hommes ou comme des femmes quand ils y arrivent pas ils sont dans la merde ça va être toutes ces petites phrases du type un garçon ça pleure pas fautendurcir les gros mots c’est pas joli dans la bouche d’une fille tu es vraiment un garçon manqué donc c’est des discours c’est des pratiques c’est des jugements c’est des images c’est des comportements c’est des loisirs c’est vaste et quand je vous dis ça finalement on a un peu l’impression que c’est tout que c’est partout et en fait bah c’est exactement ça le genre il faut vraiment avoir en tête que c’est un concept c’est un concept scientifique qui est issu des sciences humaines et sociales et c’est un concept qui nous permet à nous chercheurs et chercheuses d’étudier les rapports sociaux entre des groupes d’individus et d’analyser en fait comment ce qu’on appelle la différence des sexes va jouer un rôle dans l’organisation de nos sociétés et dans les relations entre les individus dans tous les aspects de notre vie que ce soit le travail l’éducation la famille et ce et et cetera comment est construit ce rapport de genre en fait il est basé sur ce qu’on appelle un système de bicatégorisation c’est-à-dire qu’on va séparer les êtres humains entre en deux groupes ici en fonction des catégories de sexe mâle et femelle qui deviennent les catégories sociales hommes et femmes et donc quand on étudie le genre on va s’intéresser à la manière dont ce système de catégorisation il va se construire comment des valeurs vont V être connotés comme masculine comment des comportements vont être connotés comme féminins ça c’est une première partie mais c’est pas tout le genre en fait c’est un rapport social asymétrique c’est-à-dire que la catégorie Homme et la catégorie Femme elles ne sont pas pensées comme égales ce qui est connoté masculin va généralement être valorisé là où ce qui est connoté comme féminin va généralement être déprécié c’est pour ça qu’on parle d’un rapport de pouvoir quand vous avez un métier qui aujourd’hui se féminise on va dire que c’était un c’est un métier qui est en perte de vitesse que c’est un métier qui est en train de se dévaloriser comme l’enseignement par exemple donc dernier petit point le genre c’est vraiment considérer que les inégalités sociales qu’on observe aujourd’hui bah elles sont construites elles sont sociales et on va aller s’intéresser à la manière dont les différents biologique elles sont utilisées comme un argument pour justifier des différences et des inégalités qui sont sociales ça c’est pour la base maintenant c’est quoi le rapport entre genre et innovation euh bah ils sont nombreux en fait ça fait 40 ans qu’on a des chercheurs et surtout des chercheuses qui travaillent sur ces questions donc je vais essayer de vous de vous dresser un peu un panorama et vous verrez qu’à chaque fois dans le au coin en bas à gauche des slides je vous ai mis des petites références et des conseils de lecture s il y a des points qui vous intéressent plus que d’autres pour aller rechercher des infos euh le premier lien évident entre genre et innovation en fait c’est l’accès à la formation aux carrières scientifiqu c’est sûrement le point dont on vous a le plus parlé c’est celui qui est le plus médiatique c’est celui peut-être dont on a connaissance depuis le plus longtemps euh je sais qu’Isabelle colollé par exemple est venu il y a quelqu quelques années faire une une présentation dans le cadre de mixit aussi sur sur ces questions comme je vous le disais en fait le genre ça façonne dès l’enfance et durant toute l’éducation B ça va forcément façonner les choix de loisir d’éducation de filièr c’est pas tout puisque même pour les femmes qui vont intégrer en fait des filières scientifiques ou techniques bah le parcours va être aussi semé d’embûche notamment en raison des stéréotypes sexistes et misogynes qui vont peser par exemple lors des recrutements moi ce qui m’intéresse plus c’est ce qui vient après notamment dans les espace de travail on a parlé dans quelques conférences là pendant ces de jours le manque de diversité va participer à créer des espaces de travail qui sont majoritairement masculins et donc qui vont renforcer une culture masculine dans les organisations qu’on va retrouver en fait dans les moindres petits détails de la vie quotidienne des entreprises prise je vous ai mis un petit florilège en fait des différents constats que les chercheurs et chercheuses ont pu faire il y en a qui sont peut-être plus évident que d’autres par exemple le fait que un homme nouvellement recruté va être a priori perçu dans les équipes comme compétent là où une femme va devoir régulièrement faire l’objet de test de ses compétences et va devoir aller prouver qu’elle est véritablement à sa place ça va aussi jouer par exemple dans la cohésion des équipes qui va généralement se baser sur des loisirs partagés des goûts culturels partagés qui eux-mêmes sont genrés et qui vont rendre difficile aussi l’intégration des femmes et des minorités de genre qui ne partagent pas forcément ces codes dans tous les aspects informels de la vie en entreprise un point qui est peut-être un petit peu moins connu c’est l’association inconsciente entre bon manager et bon père de famille ça c’est Catherine Marie qui l’a étudié chez les ingénieurs elle a regardé un petit peu le lien entre opportunités de carrière et nombreux d’enfants chez les femmes plus on a d’enfants moins on a d’opportunités de carrière rien de nouveau sous le soleil malheureusement en revanche ce qu’elle note et ça c’était beaucoup plus étonnant c’est que plus les hommes ont d’enfants plus en fait ils ont des opportunités de carrière et plus ils occupent des postes à responsabilité et là par contre elle trouvait ça assez étonnant commença à regarder un petit peu à faire des enquêtes à lire les les manuels et en fait elle s’est aperçu que on lit très très finement l’image qu’on se fait d’un d’un bon manager à celle qu’on se fait d’un bon père de famille et donc en fait plus un homme dans l’espace de travail va performer cette autorité parentale dans laquelle enfin va performer le rôle de père qu’il peut avoir à côté mais il va le performer dans l’espace de travail en fait plus il a de chance d’être placé à une position aussi de euh de leader par rapport un homme qui par exemple est célibataire et sans enfants qu’importe l’âge il y a aussi la question des rythmes de travail qui sont difficilement compatible avec ce qu’on appelle le second shift donc le second shift c’est la situation dans laquelle se retrouve la plupart des femmes hétérosexuel et en couple euh c’est-à-dire qu’elles ont leur journée de travail et une fois chez elles elles ont une seconde journée de travail c’est ce qu’on appelle le second shift dans lequel on va retrouver le travail domestique les tâches parentales les éducative pour information les chiffres de l’INC sur le partage des tâches ménagères ça fait 20 ans qu’ils n’ont quasiment pas évolué et il y a aussi la question des rythmes de travail dans des équipes qui sont à 100 % masculine et ben même là en fait ça peut avoir un impact concret sur les conditions de travail des femmes puisque quand dans une équipe vous demandez à vos salariés de travailler 70 80 90 he dans la semaine parce que faut sortir le jeu vidéo faut sortir l’application à telle date ben en fait si ces personnes ne sont pas célibataires si ces personnes vivent en couple si ces personnes ont des enfants généralement en fait elles peuvent tenir ce rythme de travail parce que à la maison il y a une compagne qui va prendre en charge les tâches éducatives les tâches parentales les tâches domestiques pour permettre le rythme etrainer de travail du conjoint donc là aussi en fait on va avoir des effets indirects sur les opportunités de carrière et sur les conditions de travail des femmes et ce qui est noté aussi dans les recherches et que je note encore dans mes recherches aujourd’hui c’est le fait que les initiatives en faveur de l’égalité pareil pour le handicap pareil pour la diversité elles vont généralement être perçu comme une injustice ou comme une menace ou comme des risques d’abus et donc il va vraiment falloir se battre voir faire de la résistance pour faire advenir des politiques d’égalité en entreprise donc ça jusqu’ici c’est vraiment sur le volet organisationnel moi concrètement ce qui m’a intéressé c’est plutôt de regarder quel impact ça peut avoir sur les technologies qui sont produites et sur l’innovation donc je vous propose qu’on aille un petit peu plus de ce côté-là parce que c’est le côté que j’ai le plus creusé au sein des processus de conception il y a déjà plusieurs recherches qui montrent qu’effectivement les utilisateurs et utilisatrices lambda sont ne sont pas systématiquement pris en compte au cours de la conception quand des tests d’usage sont faits il est pas rare que ces groupes test en fait ils soient majoritairement masculins et ou qu’ils aient été recrutés directement dans l’entourage proche des concepteurs ce qui fait qu’on a un biaet d’échantillonnage qui est extrêmement important l’autre problème c’est que généralement les tests utilisateurs sont faits relativement tard dans la vie de l’innovation ce qui fait que les résultats les moins concordants avec les perspectives des concepteurs et avec l’état dans lequel l’objet existe déjà vont parfois être mis de côté et on va plutôt garder le positif qui ressort des tests ce qui fait qu’on va aussi avoir des billetiss cognitifs de confirmation donc généralement on va préférer au test d’usage des processus qui sont plus rapides qui sont plus faciles qui sont plus coûteux le fait d’aller par exemple parler directement à des experts vous voulez faire quelque chose sur la parentalité plutôt que de faire des focus group avec des parents vous allez avoir un pédiatre par exemple vous allez analyser les produits déjà existants ou alors les concepteurs vont se baser sur leur propre expérience pour concevoir un produit à chaque fois en fait on va avoir des billets de reproduction de l’état existant des choses justement sur la question des concepteurs c’est un truc qui m’a vachement intéressé que j’ai passé beaucoup de temps à étudier en fait pendant pendant ma thèse il y a un phénomène qui est très documenté par la sociologie de l’innovation qui a été nommé justement par les sociologues la High methodology la méthodologie du moi c’est le fait en fait que des concepteurs vont eux-mêmes se représenter comme les futurs usagers d’une innovation pour faire des choix de conception sauf que forcément si vous avez une une équipe de concepteurs qui est très homogène bah ça va conduire à concevoir des objets qui répondent au goûts aux habitudes et aux compétences de ce groupe très homogène qui ne sont pas partagés par l’ensemble de la population et qui sont généralement très inégalement répartis par exemple euh pendant le terrain que je faisais euh pendant ma thèse il était question pour un groupe de concepteurs de concevoir un dispositif numérique à destination des personnes néophites débutantes qui ne connaissaient pas les jeux vidéos pour les accompagner pour faire de la médiation sur qu’est-ce que c’est que le jeu vidéo donc leur apprendre à jouer les accompagner leur montrer vraiment c’est quoi les règles d’un jeu de base c’est quoi une manette de jeu comment est-ce qu’on y joue sauf qu’en fait bon il voulait faire un tutoriel pas à pas sauf que bah le problème c’est que concrètement ça les emmerdait un peu c’est pas le truc le plus funky à faire c’est pas ce qui valorise le plus leurs compétences euh eux ils préféraient vraiment faire un truc paress erreur avec un dispositif un petit peu mystérieux où on sait pas vraiment comment est-ce que ça se joue o il faut toucher faut tâonner faut un peu se planter pour comprendre au fur et à mesure comment est-ce que la machine fonctionne oui parce que ça correspond à leur goût parce que ça correspond au fait que eux se sentent légitimes à toucher à bidouiller il y a pas de problème donc ça valorisait leurs compétences et au final effectivement ils ont produit un dispositif qui est basé sur l’ESS erreur et sur lequel ben moi j’ai fait les tests d’usage après bah les néophyes et les débutants ils s touche pas parce qu’ils sentent pas légitime et on va souvent observer en fait ce phénomène où finalement les concepteurs vont plutôt faire les choix de design qui valorisent leurs compétences qui valorisent ce qu’ils sont capables de faire et toute la technicité dont ils peuvent faire preuve plutôt que les choix qui vont en faveur de l’accessibilité ce phénomène où on l’imagine soi-même en tant qu’usager universel en fait il est directement lié au fait que le masculin est pensé comme neutre le féminin c’est la particularité c’est le singulier c’est le subjectif c’est la niche de dizaines et de centaines de milliers de personnes et au contraire on va plutôt éduquer les hommes blanc 6 valide htérau occidentaux de classe moyenne supérieure h à pensé que le leur expérience est universelle et en fait c’est ça la définition de l’hégémonie l’hégémonie c’est la capacité d’un groupe social à imposer son expérience du monde comme l’expérience naturelle et universelle c’est la capacité à faire passer son mode de vie comme la norme et donc à présenter les autres expériences du monde comme particulière subjectif déviante et anormale et en fait c’est ça qui va participer à faire que tout ce qui est lié de près ou de loin à des thématiques perçues comme féminine lié au handicap lié au racisme vont être jugés de moindre intérêt parce que pas universel et donc pas digne de financement mais dans le cadre des innovations en Scien ça va au-delà de la question du financement le masculin perçu comme neutre ça va avoir un impact très important et bah c’est comme ça par exemple qu’on va se retrouver avec une ceinture de sécurité qui est testée sur des modèles de corps masculin et qui va infliger au corps différents des blessures bien plus graves c’est comme ça qu’on va se retrouver pendant des années avec des erreurs de diagnostic lié à l’infarctus et un taux de mortalité bien trop élevé chez les femmes parce qu’on ne connaît pas les symptômes de l’infarctus chez les femmes à cette époque làà maintenant on a fait des recherches mais en fait on avait les les symptômes de l’infarctus chez les hommes qu’on pensé universel et donc pendant longtemps quand les femmes se plaignaient d’autres douleurs et bien elles étaient mal orientées et elles n’étaient pas diagnostiqué de l’infarctus qu’elles étaient en train de faire et ça va s’appuyer aussi sur des stéréotypes misogynes c’est-à-dire que lorsqu’une femme va se plaindre de douleur bah on va d’abord penser qu’elle est douillette qu’elle exagère qu’elle pourrait quand même faire un effort euh que c’est dans leur tête et en fait bah c’est comme ça qu’elles en meurent et j’insiste vraiment là-dessus c’est vraiment en fait si vous devez retenir qu’un truc de ce que je suis en train de vous raconter c’est ça c’est que les inégalités les discriminations en fait on en crève on en parle comme d’un truc important aussi pour l’image important pour le bien-être mais en fait aujourd’hui on en meurt je fais un pas de côté de d’une minute pour vous parler de handicap plutôt que de genre je suis une autiste don j’ai mis 33 ans à être diagnostiqué en raison du genre euh ce mois-ci il y a eu le mois de sensibilisation à l’autisme c’est le 5 avril il me semble qu’est-ce qu’on a eu en France pour la sensibilisation à l’autisme on a eu France 2 chaîne de service public qui nous a pondu un merveilleux téléfilm sur le meurtre d’un enfant autiste parce que sa mère n’en pouvait plus téléfilm qui cherche à essayer de comprendre et à expliquer le geste de la mer et on a eu ensuite un mer merveilleux débat sur un plateau télévisé où il y avait une personne autiste entourée de personnes non autistes neurotypiqu qui débattait tranquillement de est-ce que nos vies d’autistes valent autant qu’une vie neurotypique est-ce que nos vies d’autistes valent d’être vécu aujourd’hui la plupart de l’argent de la recherche pour l’autisme va dans des tentatives de dépistage de l’autisme avant la naissance pour vraiment prévenir les parents à l’avance attention vous êtes peut-être en train d’être encein d’une personne autiste euh par contre sur les aménagements au travail sur les capacités d’éducation sur simplement le bien-être et l’accompagnement des personnes autistes c’est beaucoup plus compliqué donc euh voilà parfois je suis en colère euh les inégalités donc c’est pas des malchance les inégalités elles sont construites plus ou moins enfin elles sont maintenues elles sont forcé de manière plus ou moins inconsciente parfois de manière très consciente et organisée je’y reviendrai à la fin mais dans tous les cas en fait c’est un sujet éminemment politique dans lequel on va tous et toutes avoir une responsabilité je vais me calmer un peu et on va revenir sur la question des stéréotypes euh non mais je vais pas me calmer longtemps vous inquiétez pas euh je vais vous parler d’un de mes articles de recherche préférés sur le rasoir Philips donc on l’a vu ce qui est perçu comme féminin c’est perçu comme singulier comme subjectif ce qui fait que quand on veut qu’une innovation soit utilisé par les femmes on cherche pas à la rendre universelle non on crée une innovation pour les femmes même si l’objet existe déjà on va en créer un nouveau pour les femmes alors c’est aussi un des effets du marqueet et de la segmentation du marché c’est-à-dire que faire croire qu’on a besoin d’un objet pour les hommes et d’un objet pour les femmes c’est aussi vendre deux fois plus de produits et généralement en plus les produits pour femmes sont plus chers c’est ce qu’on appelle la taxe rose mais c’est pas tout c’està-dire que ces produits pour femmes ils font pas simplement que se repeindre en rose et se balancer un petit peu de paillett la technologie elle-même en fait elle est modifiée aussi l’histoire du micro-ondes et l’histoire du rasoir électrique ces deux histoires que j’adore euh je vais vous raconter celle du rasoir électrique rapidement en fait le premier rasoir Philips conçu pour les hommes pour se raser la barbe euh il avait déjà des têtes interchangeable et pour pouvoir changer les têtes du rasoir en fait il y avait un petit système de vis qui permettait de changer les têtes mais qui permettait aussi d’ouvrir le rasoir pour faciliter sa maintenance et son entretien et donc bah ça permettait aussi d’être plus durable et puis Philips a voulu créer un rasoir pour les femmes alors effectivement ils ont changé le marketing ils ont changé la couleur ils ont changé la boîte ils ont mis une femme comme ça ils ont fait un petit un petit vanity mais en fait ils ont pas fait que ça Philips sont partis du principe que ce qui caractérisait l’usagère femme c’était sa peur des technologies c’était sa peur de la technique et donc pour lui vendre un rasoir il fallait cacher la technique la technique c’était les vis parce qu’il fallait les dévisser et donc il fallait utiliser un tournevis qu’est-ce qu’ils ont fait ils ont encapsulé l’objet technique dans une coque en plastique qui permet de clipser directement les têtes du rasoir c’est ce qu’on utilise encore aujourd’hui dans beaucoup de rasoirs au dépilateur électrique sauf que euh bah ça veut dire que l’objet en fait il était plus démontable il pouvait plus être réparé on pouvait plus aller regarder à l’intérieur comment ça se passait euh en d’autres termes en fait on opère des choix techniques qui vont avoir un effet très concret sur les possibilités des usagers et des usagères donc c’est-à-dire que concrètement on imagine une usagère incompétente et donc en retour on produit une technologie incapacitante et c’est ça en fait qui fait que les chercheuses féministes vont généralement considérer que la technologie ne fait pas que refléter l’état du monde la technologie produit elle-même le genre elle participe à entretenir des rapports de pouvoir elle participe la matérialiser des rapports de pouvoir bon maintenant je vais essayer de vous parler quand même un peu des solutions on a effectivement pendant ces de jours déjà parlé de pas mal de solutions on a parlé du fait de changer la culture d’entreprise de changer le management de réinventer les masculinités on a aussi eu des talk et des ateliers sur le fait de pouvoir écouter les utilisateurs et les utilisatrices de développer des techniques d’empathie de faire attention à la vulnérabilité euh pour notamment prendre en compte des situations qu’on ne vit pas et dont jusqu’ici on avait pas forcément conscience pour moi ça c’est un point essentiel vraiment la question de la prise de conscience c’est un élément central la plupart des billets dont je vous ai parlé en fait ils existent précisément parce qu’ils passent inaperçus parce qu’ils sont conçus enfin ils sont vraiment construit pour paraître naturel et allant de soi et donc à part partir du moment où ces billets ne se cachent plus dans dans nos automatismes mais qu’on va commencer à y porter attention bah en fait on fait déjà un pas vers la solution après moi pour ma part il y a deux axes dans lesquels je me suis engagé dans les collectifs où je suis aussi niveau pédagogie avec mes étudiants et mes étudiantes le premier c’est vraiment d’insister sur le fait de quitter cette posture ou cette volonté de neutralité et d’universalité l’idée d’un point point de vue neutre et universel c’est un mythe on est tous et toutes situé à un endroit de l’espace sociale on a tous et toutes une vision partielle et partiale des choses et si on commence à refuser le mythe de la neutralité et ben on refuse de considérer que notre expérience du monde elle est naturelle et universelle et en fait là on commence à reconnaître l’existence d’une altérité et d’autres expériences du monde parce qu’en fait quand on considère que quelque chose est naturel bah on considère que c’est pas de notre responsabilité alors que si on arrête de faire croire et de se faire croire que nos choix sont naturels et donc universel là on devient responsable de nos choix et donc on doit répondre de nos choix on doit se doter d’outils on doit se doter de méthodes qui nous permettent de les orienter et qui nous permettent justement de les rendre plus diverses et plus inclusifes ça c’est le premier point le second c’est celui de dégenrer et de désectoriser des notions essentiell les notions essentielles pour moi c’est d’un côté des notions comme la technicité ou la compétence qui sont aujourd’hui perçu comme exclusive au domaine des sciences et des techniques et traditionnellement perçu comme des attributs masculins et qu’il faut redéfinir je vais vous donner un exemple tout bête le tricot le tricot c’est un truc de meuf c’est un truc de Mamie au coin du feu c’est un truc de vieille fille qui vit avec ses chats ça tombe bien jeis une vieille fille qui vit avec ses chats mais c’est pas que ça t ça c’est l’un des derniers châles que j’ai tricoté l’hiver dernier ça m’a pris 4 mois c’est des techniques de mosaïque sur lesquelles vous avez pour chaque rang il y a à peu près 480 mailles chaque rang doit être tricoté deux fois avec deux brins de couleurs différentes où vous devez faire glisser les mailles pour constituer les motifs ça c’est de la technicité et ça je vous assure que c’est des compétences surtout quand vous devez démonter deux rangs de 480 m parce que vous êtes planté une fois euh petit autre exemple j’ai fait partie d’un hacker space quer et féministe qui s’appelait le reset qui était qui était à Paris euh c’était un peu même ambiance que que mixit mais on était hébergé dans un barqueir qui avait pour spécificité d’avoir des God michet au plafond donc on a fait des superbes photos pour pour nos ateliers euh notre but en fait c’était vraiment de valoriser les compétences techniques des femmes et des personnes cuir et des personnes trans quand j’organiser des ateliers de conception de jeux vidéo avec Clément en fait on cherchait activement des femmes et des minor ité de genre qui connaissaient les langages de programmation pour nous épauler pourquoi parce que Clément et moi en fait on se voyait comme des personnes sans compétences parce que globalement on savait pas côter on savait pas coder donc on se disait qu’on savait rien faire sauf que en fait bah les ateliers ils ont tenu pendant des années et pourquoi ils ont tenu bah parce qu’on avait une pratique hyper réfléchie de médiation d’animation chaque mois on se réunissait on réfléchissait à comment est-ce qu’on allait accueillir les gens qu’est-ce qu’on allait dire qu’est-ce qu’ on allait quels mots on allait utiliser en introduction on veillait à ce que le vocabulaire soit pas trop technique comment est-ce qu’on allait accompagner valoriser les compétences des autres pendant les ateliers en fait on se répartier les rôles pour observer vraiment les dynamiques de groupe pour aller valoriser les personnes pour leur donner la parole on réfléchissait aussi à l’agencement matériel pour être sûr qu’il y a des petits coins un petit peu plus tranquilles pour les gens qui n’osent pas trop qui a besoin d’un petit peu plus d’intimité on réfléchissait à toutes ces choses-là et en fait on passait aussi beaucoup de temps à écouter euh tout ça ça s’appelle du cur du soin de l’écoute de l’empathie Clément et moi on est tous les deux des personnes trans ou non binaires mais en fait on a été tous les deux socialisés comme des petites fille on nous a appris que ces valeurs là en fait bah elles étaient innées que c’était notre rôle de les endosser et que finalement c’était naturel sauf qu’en fait bah c’est faux le C c’est des compétences le C c’est des savoir-faire et à partir du moment où on s’est dit ça bah Clément et moi on s’est aperçu qu’on avait des compétences qui étaient précieuses on s’est mis à les formaliser à écrire dessus à faire des fiches à faire des ateliers au sein du hackers space pour former les autres personnes chargées d’animation à l’accueil à l’accompagnement et en fait à partir du moment où on a fait ça bah on a fait du C une compétence et un savoir-faire qui peut se partager qui peut se transmettre et que chaque personne toute personne qu’importe son identité de genre peut endosser dès lors qu’elle apprend ses savoir-faire et ça c’était vraiment un élément essentiel pour modifier un petit peu les les dynamiques qui se passaient aussi dans nos têtes dernière peti dernier petit point supporter et défendre les droits des personnes minoritaires et après promis je rends le micro euh je voulais vraiment insister en fait sur la nécessité de supporter et de défendre activement les droits des minorités surtout dans le contexte actuel euh pendant 2 jours on a parlé de euh enfin on a je vais reprendre ma phrase euh dans nos espaces aujourd’hui dans vos espaces si vous avez pu utiliser et bénéficier de notions ou d’autis comme la non mixité comme les enjeux liés à la masculinité hégémonique des termes comme inclusion neuroatypie privilège intersectionnalité en fait tout ça c’est des termes qu’on doit à des minorités qui se battent en fait depuis des décennies pour créer et pour produire du savoir sur leurs conditions et qui milit pour la reconnaissance de ce savoir aujourd’hui en France et pas que on a des groupes situés politiquement à droite et à l’extrême droite qui se battent concrètement pour retirer et restreindre les droits des personnes trans si aujourd’hui on a des concepts hyper utiles comme celui de la masculinité hégémonique c’est grâce à des chercheuses et à des militants de trans par exemple aujourd’hui en fait euh on est dans une situation où euh on se bat contre nos droits on se bat contre notre existence on se bat contre le fait qu’on puisse accéder à des soins on se bat contre le fait que des adolescents et des adolescentes puissent se poser des questions sur leur genre on se bat contre le fait que des autistes puissent avoir accès à la transition puisqu’on serait pas responsable de nous-mêm et donc euh malheureusement on se bat parfois un petit peu dans l’indifférence générale alors que ces personnes-là ont beaucoup la parole partagent beaucoup l’espace médiatique donc je pense que si au-delà de la question de la responsabilité au-delà elà de la question de l’inclusion s’il y a quelque chose à faire aussi aujourd’hui c’est euh supporter et défendre activement les droits des personnes minoritaires parce que si on veut continuer à bénéficier d’outils comme ceux qu’on a employé pendant 2 jours si on veut continuer à bénéficier de ces savoirs là pour faire avancer les choses en fait on a besoin de ces groupes minoritaires qui aujourd’hui sont très précaires et sont aussi menacés merci beaucoup [Applaudissements]

    Leave A Reply