Enseignement 2023-2024 : L’universalisme des Lumières : débats et controverses
    Cours du 29 janvier 2024 : L’universalisme critique : le paradoxe du paria

    Professeur : Antoine Lilti
    Chaire Histoire des Lumières, XVIIIe-XXIe siècle

    La Chaumière indienne est un court récit de Bernardin de Saint-Pierre, un conte philosophique, publié en 1791. Il met en scène la rencontre d’un savant anglais et d’un paria indien, un face-à-face entre la culture savante des Lumières européennes et le « cœur simple » d’un homme méprisé et rejeté, ayant trouvé le bonheur loin des villes et de la civilisation. Une lecture de cette œuvre aujourd’hui oubliée, mais qui fut beaucoup lue, nous met sur la piste de l’invention de la figure du paria dans la culture européenne, où l’Inde, plus fantasmée que réelle, sert à penser les ambivalences de l’émancipation. Au nom de l’universel, les philosophes dénoncent une situation d’injustice. Mais le paria doit-il se révolter ou chercher dans son malheur la source d’un bonheur plus authentique, en dehors de la société des hommes ? Au-delà de la situation de l’Inde, présentée comme l’archétype de la société hiérarchique, le thème du paria permet d’interroger le statut, dans la pensée des Lumières, des groupes discriminés et tout particulièrement des esclaves. On verra alors comment les abolitionnistes africains-américains, à la fin du XVIIIe siècle, ont développé un discours émancipateur, en articulant l’égalité des droits et un discours évangélique nourri par le renouveau de la foi protestante.

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    [Musique] bonjour bonjour à toutes bonjour à tous euh ceux et celles euh d’entre vous qui ont suivi le cours l’an dernier se souviennent sans doute en je l’espère des derniers mois d’autourou lorsque celui-ci attendait mélancolique à l’île-de-fance qu’une expédition soit organisée pour le ramener à Tahiti nous avions commenté le

    Témoignage précieux de Bernardin de Saint-Pierre qui séjournait alors sur l’île où il a passé 3 ans de 1768 à 1771 frappé par l’importante communauté indenne qui résidait à l’île-defance Bernardin en a été amené à s’intéresser à l’Inde qui commençait alors à susciter la curiosité des milieux littéraires et

    Philosophiques français à vrai dire cet intérêt n’était pas tout à fait nouveau on peut penser notamment au au célèbre voyage en Inde de François Bernier au 17e siècle mais il avait il s’était accéléré disons dans les années 1740 au moment où la France semblé sur le point

    De se construire un empire colonial dans le sous-continent sous l’autorité de François Joseph duplex l’enthousiasme alors avait alimenté un début de de fascination exotique pour l’Inde fabuleuse selon l’expression de Jacquy Assayag alors vous le savez l’aventure impériale a mal tourné pour les Français puisqu’ils ont été presque entièrement chassés d’Inde

    Durant des Indes durant la guerre de 7 ans par les Anglais à l’exception de quelques comptoirs il reste que l’Inde était désormais bien inscrite sur la carte mentale de l’Europe et cet intérêt n’a fait que croître avec la rapide conquête de l’Inde par l’East Indian company phénomène assez inoui et on ne

    Peut pas insister insister assez une compagnieist Indian compagnie qui était donc une compagnie de commerce privé a conquis en quelques années d’immenses territoires qu’elle ne cherchait guerre à l’origine à administrer mais dont elle souhaitait tirer le plus de profit possible jusque-là les savoirs sur l’Inde étaient restés assez limités

    Reposant sur quelques récits de voyage des lettres de missionnaires et les effets méritoir d’aventuriers philosophes comme antil d Peron qui a séjourné en Inde dans les années 1750 et et en a rapporté de précieux manuscrits l’arrivée des Anglais a suscité à la fin du siècle une production nouvelle de

    Savoirs orientalistes sur l’Inde dont témoigne la création de la Société asiatique de Calcutta en 1784 sous l’égide de William Jones véritable académie savante consacrée à la connaissance de l’Inde ancienne et moderne alors pendant ce temps Bernardin Saint-Pierre lui était rentré en France et il s’était fait un nom dans la vie

    Littéraire par la publication d’abord de son voyage à l’île-de-fance puis de ses études sur la nature et surtout vous le savez par le succès le grand succès remporté par son roman Paul et Virginie publié en 1788 l’année suivante il manifeste son adhésion à la Révolution notamment dans ses vœux d’un solitaire j’en parlerai

    Puis il publie en 1791 un court roman presque une nouvelle intitulé La chomière indienne dans lequel il donne libre cours à son intérêt pour l’Inde le texte connaî un réel succès il est tout de suite réédité traduit en anglais il continuera à être beaucoup lu au 19e siècle influençant

    Par exemple George Sand ou Flobert avant d’être totalement oublié à mesure que la réputation Postume de Bernardin s’estompé ne laissant subsister et encore que Paul et Virginie et l’image d’un adepte naïf du finalisme providentiel qui croyait que les melons étai fait pour être mangés en famille à

    Cause de leur forme alors c’est cette chaumière indienne dont je voudrais vous parler aujourd’hui l’histoire est la suivante aux environs de 1760 un savant anglais arrive en Inde dans le cadre d’une grande opération de la Royal Society britannique consist envoyé des expéditions dans le monde entier munie

    De copieux des questionnaires de façon à rassembler un savoir véritablement universel après un long voyage qu’il a mené de Constantinople au Liban de la Perse à déie le voici à Benarès sur les bords du Gange où il complète sa collection de manuscrits rares et de livres anciens et s’entretient avec les

    Brahmanes ou les brames comme on disait à l’époque puis au moment de rentrer à Londres avec sa riche cargaison de lumière c’est expression patatra il réalise que tout ce savoir accumulé loin de l’avoir rendu plus éclairé l’a au contraire plongé dans des afres de perplexités et de doutes qu’il s’est

    Perdu je cite dans un vaste labyrinthe de réponse et d’autorité contradictoire le voici désespéré accablé de chagrin alors qu’il pensait avoir Triomph ement rempli sa mission il découvre que cette accumulation de savoir était veain et qu’elle l’a conduit à une impasse il décide alors d’aller consulter le grand Brahman du

    Sanctuaire de jagagronat qu’on appelle aujourd’hui daganat qui était réputé pour être le plus important temple hindou voyez que Bernardin avait bien lu sa documentation il décide de se concentrer non plus sur son questionnaire mais sur trois questions essentielles presque ex ti universelle pourrait-on dire qu’est-ce que la

    Vérité comment peut-on la connaître et à qui faut-il la révéler il se met en route mais il est très mal reçu par le grand Brahman personnage odieusement arrogant et autoritaire entouré de prêtres sectaires qui se content de lui de lui répondre que seul les brahmanes peuvent connaître la vérité qu’elle est

    Conservée dans des manuscrits sanscrits datant de 120000 ans que seul peuvent lire et qu’il n’en communiqu les secrets à personne oui j’ai 120000 ans vous avez bien bien entendu en plaisant pas avec l’antiquité de la tradition chez les chez les Brahman de jacquesrenat alors je ne vous cache pas

    Que notre savant est un peu déçu et d’ailleurs il ne cesse de rouspetter sur le le le chemin du retour l’homme est donc condamné par toute la terre aux erreurs et aux disputes c’était bien la peine de venir aux Indes consulter les brames mais surpris par l’ rage il est

    Contraint de se réfugier et il se réfugie chez un paria au grand scandale de ces accompagnateurs indiens qui refusent d’entrer dans cette chaumière infâme habité par un homme impure qu’ils n’ont pas le droit de toucher alors l’anglais lui est anglais donc pragmatique et il déclare crânement pour

    Moi toutes les castes de l’Inde me sont égales lorsqu’il s’agit de de me mettre à l’abri de la pluie il y découvre dans cette chaumière un homme donc le paria sa femme et leur bébé qui bien que méprisé et rejeté de tous vivent dans la simplicité le bonheur domestique et l’harmonie naturelle

    Bernardin s’amuse ainsi à déjouer les attentes là où le lecteur s’attendait à un spectacle désolant à la peinture du malheur et de l’infamie c’est au contraire un tableau de genre vertueux bucolique bon on se croirait chez greuse le savant pose alors ces trois question au paria celui-ci répond

    Premièrement que la vérité se trouve dans la nature deuxièmement qu’on ne peut la connaître qu’avec un cœur simple et pure et troisièmement qu’il ne faut la transmettre qu’aux hommes qui ont le cœur simple c’est-à-dire aux gens de bien qui a cherche et non au méchant qui la repousse alors notre héros est

    Enchanté de tant de sagesse et sur cette gravure qui est tirée de l’édition illustrée la grande édition illustrée des romans de Bernardin en 1838 vous pouvez assister aux adieux émouvants du paria et du savant anglais alors vous le voyez la morale est construite autour d’ d’un double contraste d’abord celui qui oppose de

    Façon évidente le Brahman et le paria d’un côté l’arrogance cléricale et sectaire le préjugé le pouvoir le mépris de l’autre une sagesse simple à l’écart de toute ambition la pratique ordinaire de la vertu l’hospitalité l’amour conjugal et la vérité est entièrement du côté du second ce paria misérable qui

    Est le garant de la vertu contre les élites corrompues ce qui dans le contexte révolutionnaire de 1791 était un discours politique immédiatement compréhensible la préface d’ailleurs insiste sur ce point la critique des castes et la critique de tout statut et même de toute inégalité fondé sur la naissance et et l’hérédité

    Aucun être humain ne peut être tenu pour responsable en bien ou en mal des actes de ses ancêtres ça c’est la première opposition deuxème opposition Bernardin donc oppose le paria aux savants européens la sagesse simple et naturelle du premier ne contredit pas seulement les mystères religieux des Brahman mais

    Aussi les prétentions savantes des académies européennes le projet de la Royal Society est présenté comme enfin il est présenté avec une emphase dont la dimension ironique est criante les 20 savants qui ont été envoyés tout autour du monde dans différents pays ont été munis chacun de 3500 questions ça c’est

    C’est du formulaire de façon et c’est autre chose que celui qu’on vous fait remplir à la fin des cours heureusement de façon à consulter je cite le plus superbe édifice encyclopédie qu’aucune nation e encore élevé au progrès des connaissances humaines il s’agissait d’aller chercher dans diverses parties

    Du monde des lumières sur toutes les sciences afin d’éclairer les hommes et de les rendre plus heureux vous voyez Bernardin sa génie a parodié le langage des lumières et des académies savantes mais le projet se heurte très vite à l’évidence que la diversité des savoirs ne se laisse pas réduire en système loin

    De former un ensemble cohérent elle ne produit que des réponses contradictoire elle suscite des controverses sans fin et sans intérêt le paria à l’inverse vit totalement à l’écart de la culture écrite il ne possède aucun livre ne sait ni lire ni écrire vous vous êtes épargné

    Bien des doutes dit le docteur en se frottant le front Bernardin en profite évidemment pour régler ses comptes avec les académies qui n’ont pas reconnu ces travaux sur les marais qui il faut dire contredisaient totalement les théories de Newton mais au-delà ce qui est plus intéressant et plus original c’est le

    Rejet total de la culture écrite et de toute dimension cumulative du savoir au nom d’un rapport immédiat et sensible au monde et à la nature je cite un passage la vérité me serait suspecte répondit le paria si elle ne venait à moi que par le moyen des hommes ce n’est point parmi

    Eux qu’il faut la chercher c’est dans la nature la nature est la source de tout ce qui existe son langage n’est point inintelligible et variable comme celui des hommes et de leur livre les hommes font des livres mais la nature fait des choses fonder la vérité sur un livre

    C’est comme si on l’a fondé sur un tableau ou une statue qui ne peut intéresser qu’un pays qu’un pays et que le temps TER chaque jour donc la science comme l’art est une production humaine c’est un artefact culturel elle est donc variable localisée elle ne peut intéresser qu’un pays elle est variable

    Le temps l’altère elle ne peut donc avoir aucune prétion à l’universalité seul un rapport immédiat à la nature c’est-à-dire un rapport fondé sur l’expérience directe peut permettre d’accéder à une vérité et donc par l’intermédiaire du paria Bernardin développe une critique de la raison au profit du sentiment la raison nous

    Trompe parce qu’elle est fondée sur l’intérêt ce qui explique qu’elle soit si variable par toute la terre alors cette diversité des idées des pensées était généralement renvoyée à la diversité des préjugés auquels les philosophes des Lumières opposaient la raison comme garante universelle de la vérité non non répond le paria la raison

    Est variable elle-même la seule faculté d’accès aux vérités universelles passe par le cœur et le sentiment à l’intelligence et à l’esprit il oppose donc le cœur il faut chercher la vérité dit-il avec un cœur simple c’est la formule qui revient tout au long du discours du paria pourquoi parce que le cœur ne

    Trompe jamais votre réponse est profonde dit le docteur il faut d’abord chercher la vérité avec son cœur et non avec son esprit alors vous AZ compris ces deux oppositions le paria face au et le Brahman et puis le paria et le savant européen en fait ces deux oppositions ne

    Font qu’une le roman ne cesse de montrer qu’il existe en réalité une solidarité entre les hiérarchies intellectuelles sociale et religieuse lorsque le savant anglais part chargé de cadeau pour le temple de jacrenat le narrateur commente on e pris le docteur avec son bel équipage pour un commis de la Compagnie

    Des Indes ce qui est une manière évidemment de souligner le lien entre désir de savoir et domination impériale comme si Bernardin de Saint-Pierre avait lu Edward Said et Michel foucot plus largement la critique s’exerce à l’égard d’une conception du savoir qu’ l’identifier à une marchandise une marchandise que l’on

    Pourrait acheter que l’on pourrait stocker et surtout que l’on pourrait accumulé d’ailleurs le savante anglais est parti en Inde muni de lettres de recommandation mais surtout ce qui vaut mieux dit le narrateur de lettres de change sur les meilleurs banquiers de Londres or cette accumulation est un leur le

    Commerce ne saurait être le modèle d’un accès à la vérité les connaissances ne s’ajoutent pas les unes aux autres comme des pièces dans un trésor elles se contredisent elles se détruisent mutuellement l’accumulation loin d’aboutir à l’universalité d’un savoir total ne conduit qu’à multiplier les contradictions et les et les désaccords

    Elle risque surtout d’aboutir à la confiscation du savoir par une petite caste de savant de la même façon que les aristocrates accumulent le pouvoir et que les marchands accumulent la fortune comme l’écrit Bernardin dans le préambule de la chaumière il écrit ceci la vérité même est funeste aux hommes

    Quand elle devient le patrimoine d’une tribu patrimoine le mot ici n’est évidemment pas zanodin la vérité comme les richesses peut-être accaparé par des prêtres ou par des académiciens et rien n’est plus dommageable à l’inverse le paria lui ne possède rien il n’accumule rien il vit dans le dénuement matériel

    Sa seule richesse et l’amour de sa femme et sa connaissance de la nature et c’est précisément ce qui lui permet d’atteindre le véritable universel celui du cœur et du sentiment rejeté exclu de la société dépouillé de tout orgueil de toute vanité de tout préjugé aussi il devient au fond une figure de l’humanité

    Et c’est ce que lui-même formule ainsi dans cette phrase très frappante ne pouvant être indien je me suis fait homme alors comme vous le voyez le récit a beau se présenter comme un compte philosophique avec une satire anticléricale sa leçon n’a rien à voir avec la philosophie de Voltaire tout au

    Contraire en bon disciple de Rousseau Bernardin fait de son paria un homme de la nature au double sens de celui qui vit au plus près du monde naturel loin des sciences et des arts à l’écart des villes et de la civilisation mais aussi de celui qui communie avec la nature qui

    A développé une philosophie nature elle très proche d’un humanisme religieux évangélique Bernardin insiste d’ailleurs dans son préambule sur le fait que le discours du paria est calqué sur celui de Jésus dans les évangiles autrement dit la critique des inégalités et des prêtres ne débouche pas sur le rationalisme voltaérien ou

    Sur une pensée du progrès à la condoré mais sur un discours empreint de de religiosité et très proche en ce sens de la profession de foi du vicaire savoyard dans lesmilles de Jean-Jacques Rousseau alors la question qu’on peut se poser maintenant c’est au fond d’où vient d’où vient cette figure du paria

    Autour de laquelle Bernardin construit un discours nouveau de l’universel complètement à rebrousseepoil du discours universaliste et rationaliste des lumières qui était fondé nous l’avons vu les semaines Pr précédente hein c’était tous mes cours des des dernières semaines fondés sur le commerce le savoir et la civilisation alors le mot paria apparaît

    Dans les textes portugais du début du 16e siècle et les spécialistes estiment que c’est une déformation une déformation du terme indien qui désigne la caste une caste très particulière qui éit la ce des joueurs de tambour à Madras avec lesquels les Portugais étaient en contact fréquent notamment parce qu’ils s’y fournissaient

    En domestique et qu’ils ont donc confondu par une sorte de malentendu cette caste des joueurs de tambour avec les hors castes les intouchables ceux qu’on appelle dans l’Inde contemporaine les dalites le terme néanmoins est resté très peu diffusé limité à quelques récits de voyage et n’est entré dans le

    Langage public au 18e siècle un des premiers textes à en avoir popularisé l’usage c’est l’histoire philosophique des deux Indes de l’abbé rénale que j’avais déjà évoqué la semaine dernière alors dans le premier volume on trouve une longue description de l’Inde plutôt de l’Indostan comme on disait alors dans laquelle est dénoncé la situation

    Sinistre faite au paria l’ensemble du texte est construit autour de l’opposition entre l’Inde antique berceau de la civilisation et de la sagesse et l’Inde contemporaine saturé par l’injustice et la superstition après avoir décrit les quatre castes principales de l’Inde renal ajoute je cite outre ces tribu il

    Y en a une 5quème qui est le rebut de toutes les autres ceux qui les composent on les emploie les plus viles de toute la société ils enterrent les morts ils transportent les immondices et se nourrissent de la viande des animaux morts naturellement ils sont dans une

    Telle horreur que si l’un d’entre eux osait toucher un homme d’une autre classe celui elci a le droit de le tuer sur le champ et c’est la description du des pari l’édition de 1780 je vous avais dit a trois grandes éditions donc l’édition de 1780 3e dernière et la plus précise

    Encore elle ajoute des détails et conclut cet excès d’abilissement où l’on voit plonger une partie considérable d’une nation nombreuse a toujours paru une énigme inexplicable les esprits les plus clairvoyants n’ont jamais démêlé comment des peuples humains et sensibles avaient pu réduire leur propres frère à une condition si abjecte

    L’Inde devient ainsi la société indienne devient ainsi le symbole d’une société radicalement inégalitaire où des individus font l’objet d’une exclusion abectent et sont jugés selon la formule de renal indignes de participer aux avant de l’humanité al vaut la peine d’ailleurs de noter que en schématisant français et anglais réagissent différemment à cette

    Situation et à cette image pour les Anglais le système des castes est une spécificité immémoriale de l’Inde qu’il s’agit donc de respecter de maintenir quelle que soit la condamnation qu’elle peut susciter ce qui renforce d’ailleurs le sentiment de supériorité morale des Européens et il existe d’ailleurs j’ai

    Pas le temps dire entre aujourd’hui mais sachez qu’il existe tout un débat chez les historiens et chez les anthropologues pour savoir dans quelle mesure les Anglais ont en réalité renforcé le système des castes voir s’ils ne l’ont pas en partie inventé pour les Français en revanche il s’agit d’abord d’un contre-modèle un

    Contre-modèle qui permet de penser en miroir la nécessité de réformes égalitaires en France et c’est véritablement comme ça évidemment que euh euh R Etro l’utilise mais il faut remarquer aussi que Bernardin ne reprend qu’en partie cette critique virulente qu’il a pu trouver dans l’histoire philosophique des deux Indes mais aussi dans le récit

    De voyage de Pierre sonra publié en 1782 dont il s’est inspiré bien sûr dans son texte aussi chez Bernardin donc la situation du paria ne peut que choquer le récit que celui-ci fait de son expérience et de son et celle d’une succession de malheur pas le temps de vous la décrire ici mais

    Pour aller vite le paria est rejeté de tous il est proprement déshumanisé d’ailleurs lorsque le savant anglais pendant l’orage entend pour la première fois parler du paria en voyant les cris affollés des Indiens qui l’accompagnent sa première réaction et de saisir ses pistolets persuadés qu’il s’agit d’un animal féroce mais l’originalité de

    Bernardin nous l’avons vu c’est que son paria n’est pas exclu de l’humanité et de l’universel il est exclu de la société qui est bien différent parce que ça lui permet justement d’accéder à une humanité plus authentique Bernardin va même plus loin en nous présentant le paria vivant avec sa femme et son enfant

    Dans une sorte de bonheur familial et conjugal le paria se déclare d’ailleurs tout à fait heureux n’ayant de compte à rendre à personne qu’à Dieu un paria est moins malheureux qu’un empereur déclare-t-il à la grande surprise de son interlocuteur bref tel cisif il faut imaginer le paria heureux et c’est ce

    Que j’appelle ce que je vous propose d’appeler le paradoxe du paria qui débouche notons-le sur une aporie politique pourquoi dénoncer l’inégalité et l’injustice si les personnes les plus discriminé peuvent trouver la justice et la vérité plus facilement que les élites c’est une contradiction une contradiction dans le texte de Bernardin et une contradiction

    On le sa qui est au cœur du message évangélique celui-ci pouvant aussi bien nourrir une critique de l’inégalité sociale qu’une forme de résignation dans l’attente du salut et du Jugement Dernier non seulement le paria est heureux mais il est totalement vertueux dans les textes de didro et

    Le paria était avili il ne pouvait développer aucune des qualités sociales qui sont le propre d’un humain civilisé pour Bernardin à l’inverse le paria est l’archétype du noble sauvage sauvage que l’on peut entendre au sens propre l’homme des bois puisqu’il vit dans la forêt à l’abri d’ailleurs d’un il a construit sa

    Chaumière à l’abri d’un grand figuier bagnant il presque un inséré comme ça dans la dans la dans le dans la forêt il est moins un exclu qu’un ermite s’étant volontairement retiré de la société des hommes comme l’a montré dans un très bel article Raphaël Rousselot Bernardin de Saint-Pierre a en réalité fusionné deux

    Figures celle du noble sauvage que l’on trouve chez montaige ou chez laontan et qui renvoyait plutôt à l’Amérique et une autre tradition celle du sage nu le gymnosophiste qui remonte à la trad justement à la représentation des brahmanes indiens par les grec à l’époque d’Alexandre le grand moment où

    Alexandre donc arrive en on a plusieurs récits dans l’Antiquité grecque par exemple chez plutarc hein qui laisse une image des brahmanes comme des assetes végétariens vivant nus dans la nature totalement détaché des biens matériels et des honneurs alors c’est une représentation qui a perduré qui a perduré non seulement dans la

    Littérature de l’Antiquité tardive par exemple dans le roman d’Alexandre au 3e siècle ou dans toute la tradition cynique qui voyait dans ces brahmanes des équivalents orientaux de Diogène mais aussi chez les auteurs chrétiens par exemple chez Ambroise de 1 an au 4e siècle qui décrivait ainsi l’accueil des

    Brahmanes à Alexandre je cite si vraiment donc Brahman qui qui s’adresse à Alexandre si vraiment tu veux connaître la vérité viens en Inde vivre nu parmi le monde sauvage en renonçant à tous les honneurs que tu chéris à toutes les marques de distinction que tu portes alure alors seulement nous t’accepterons parmi

    Nous la conclusion d’Ambroise ENF si c’est bien Ambroise les spécialistes discutent de l’attribution du texte enfin la conclusion d’Ambroise bien sûr était néanmoins la supériorité du christianisme ironiquement chez Bernardin le Brahman est lui devenu un prêtre opulent et orgueilleux alors que la figure du sage nu est désormais endossé

    Par le paria qui a en quelque sorte renversé le stigmate en acceptation heureuse du dépouillement en cela il évoque un peu le hautantau cité par Rousseau dans le discours sur l’inégalité qui rejette ses vêtements néerlandais pour retourner vivre libre parmi les siens mais aussi pour nous la figure de Pautou

    Le thaïtien éduqué par les Espagnols qui lui aussi se déshabille se dépouille au moment où il ront avec les Espagnols et repart vivre parmi les siens j’avais traité ces deux figure et leur rapprochement l’an dernier dans une des des séances alors à C cette différence près évidemment que le paria lui a été

    Rejeté qu’il est discriminé et méprisé au cours du 19e siècle la figure du paria va connaître un élargissement et une mutation pour devenir une figure générique de l’exclusion sociale et de la marginalité subie du mépris institué de la discrimination comme l’a montré hlénie varicas dans un très beau livre

    Que j’avais cité lors de la première séance et sur lequel je m’appuie ici les rebuts du monde euh fragment du pariaia deux pièces de théâtre à succès accompagnent cette transformation du du paria en figure générique c’est d’abord le paria justement de Casimir de la vigne en 1821 histoire d’un paria indien

    Qui réussit en cachant son identité à sauver Benares des envahisseur puis qui est découvert et condamné à mort par cela même qui l’a sauvé à travers cette figure romantique du proscrit héroïque la pièce contenait énormément d’allusion à la situation en Europe et aux promesses inaccomplies des droits de

    L’homme 2 ans plus tard une autre pièce celle d’un auteur allemand Michel be joué en 1823 à Berlin et qui qui s’intitule pas très original d’Er paria et reçu triomphalement notamment par gut qui s enthousiasme l’auteur de la pièce appartenait à la communauté juive berlinoise sa mère était une assez

    Célèbre salonnière de Berlin et la pièce a été pensée et reçue et comprise comme une réflexion sur la situation des Juifs en Prusse après l’émancipation dans un contexte les années 1820 de recrudesence de l’antisémitisme en Prusse la pièce d’ailleurs été par la suite une des références de Max Weber au

    Moment où celui-ci a développé sa théorie sociologique du groupe paria théorie qu’il a ébauché d’abord dans son travail sur l’hindouisme mais surtout qu’il a développé dans son livre sur le judaïsme antique rédigé à la fin de la première guerre mondiale pour Max Weber les Juifs sont l’archétype du groupe

    Paria c’est-à-dire des étrangers vivant dans une une société qui les tolère parce qu’ils exercent des tâches impures et nécessaires mais dont ils sont séparés par des interdits rituels et par l’interdiction de l’exogamie ils sont ainsi discriminés sur une base ethnique ou du moins héréditaire considéré comme impur tout en étant économiquement dépendant pour

    Weber cette situation du groupe paria alimente une forme spécifique de religios fondé sur l’acceptation de ce statut discriminé sublimé en mission universelle et en espérance du salut il écrit par exemple la condition de peuple paria en tant que tel et son acceptation patiente deviennent ainsi le degré suprême de la

    Religiosité par la suite Anna harent a repris cette lecture pour développer sa propre Thor du Juif émancipé comme comme paria partagé entre l’acceptation de la marginalité la soumission à l’ordre établi la révolte révolutionnaire du paria conscient son terme qu’elle reprend à à à Bernard Lazar le rire poétique et

    Humaniste toute une série en fait de de possibilités qui s’offr au Juifs émancipés mais restant dans une situation de relative dépendance he donc marginal acceptation de la marginalité soumission à l’ordre établi révolte révolutionnaire du paria conscient rire poétique et enfin l’utopie d’une intégration réelle à la société des hommes sur la base d’une

    Réelle égalité des droits mais ce qui reste ce qui restait pour arent une utopie la figure du paria élaboré à partir de représentation littéraire fictionnelle de l’Inde est devenu ainsi un outil pour penser le rapport des groupes discriminé à l’idéal d’une insertion égalitaire dans la société elle fait ressortir les ambivalences de

    L’universalisme le paria cherche-t-il avant tout à échapper à sa condition en se fondant dans la société majoritaire cherche-t-il à se faire adopter des élites en singeant leur comportement ou doit-il au contraire accepter son statut et dans ce dernier cas le fera-t-il sous la forme de l’acceptation et du

    Renoncement de la sécession assumée et de la marginalité revendiquée avOcatiOn religieuse ou artistique ou le fera-t-il plutôt sur le mode de la rébellion de la contestation et de l’activisme minoritaire on retrouve ici une tension inhérente à la question de l’émancipation des groupes discri vous vous souvenez peut-être que j’avais

    Évoqué dans la première séance la théorie du philosophe américain Michael wer qui opposer deux sortes d’universalisme d’une part l’universalisme de surplomb celui de la loi égale pour tous et d’autre part ce qu’il appelle l’universalisme réitératif celui de la révolte la révolte d’un peuple à la recherche de la

    Liberté de sa liberté dont il trouvait la forme originelle dans la sortie d’Égypte des Hébreux telle qu’elle est évidemment racontée dans l’Ancien Testament les Hébreux sous pharaon c’est aussi le groupe paria par excellence pour Max Weber et toute l’ambiguité se trouve dans ce geste qui est en réalité moins une révolte qu’une

    Sécession qui n’est pas seulement l’affirmation d’un sentiment de justice bafouée mais aussi la revendication d’un d’une destinée propre du groupe paria guidé par son Dieu et par la recherche de la Terre Promise alors il y aurait évidemment beaucoup plus à dire sur les usages de la figure du paria dans la philosophie

    Et les sciences sociales du 20e siècle et j’en redirai un mot tout à l’heure mais je voudrais signaler que cet élargissement métonymique du pari indien à d’autres situations de discrimination collective qu’on rattache en général au 20e siècle et bien cette cet élargissement se trouve déjà chez Bernardin de

    Saint-Pierre dans le préambule de la chaumière indienne voilà ce qu’il écrit c’est à l’influence prétendue de la naissance que sont attachés la plupart des MUXs humains c’est sur elle que sont fondé la haine et le mépris qui avilissent qui a ACC pardon qui accable une foule d’hommes utiles et même des

    Peuples entiers l’esclavage des les persécutions faites aux Juifs l’ancienne serviture féodale de nos paysans l’oppression des Guèbres c’est-à-dire des euroastriens l’oppression des Guèbres chez les Turcs l’infamie des parias chez les Indiens alors j’en profite pour préciser un point important qui vaudra pour d’autres textes le terme ngre qui est pour nous

    Aujourd’hui évidemment profondément choquant associé aux pires discrimination raciste était un terme très fréquemment employé au 18e siècle même par des auteurs c’est le cas de Bernardin animé si on peut dire des meilleures intentions je fais donc le choix lorsque je lis des citations de ne pas le modifier pour des raisons

    Historiques il s’agit de sources mais sans évidemment le reprendre à mon compte vous l’avez bien compris et surtout en m’excusant auprès de ceux que fait d’entendre ce ce ce terme pourrait légiement légitimement heurter alors au demeurant que la situation des esclaves soit évoqué en premier dans le texte de Bernardin que

    Je viens de citer n’est pas un hasard depuis son séjour à l’Île-de-France où il avait pu constater la situation des esclaves Bernardin ne cessait d’en dénoncer les horreurs plusieurs passages de son voyage à l’île-de-fance critique ouvertement les ravages de l’esclavage et la cupidité des Européens tellement

    Attaché au café et au sucre qu’ils ont je cite dépeuplé l’Amérique pour avoir une terre où les planter et qu’ils dépeuple l’Afrique afin d’avoir une nation pour les cultiver c’était surtout une mise en accusation des souffrances infligé par les maîtres aux esclaves je cite j’ai vu chaque jour fouet des

    Hommes et des femmes pour avoir cassé quelques poterie oublié de fermer une porte j’en ai vu de tout sanglant frottter de vinaigre et de sel pour les guérir j’en ai vu sur le port dans l’excès de leur douleur ne pouvoir plus crier d’autres mordre le canon sur

    Lequel on les attache ma plume se lasse d’écrire ses horreurs mes yeux sont fatigués de les voir et mes oreilles de les entendre la critique de l’esclavage se fonde ainsi non pas sur un discours théorique abstrait mais sur une expérience sensible dans tous les sens du terme si Bernardin peut écrire

    Aussi fermement contre l’esclavage c’est parce qu’il a vu et entendu parce qu’il a été le spectateur ému du malheur d’autres êtres humains avec lesquels il s’est identifié parce que leur sort l’a révolté et qu’il veut emporter témoignage dans sa préface il écrit au reste je croirais avoir été

    Utile aux hommes si le faible tableau le faible tableau du sort des malheureux noirs peut leur épargner un seul coup de fouet et si les Européens qui crient en Europe contre la tyrannie et qui font de si beaux traités de morale cessent d’être aux Indes des tyrans Barbar alors comme l’ont noté Vladimir

    Capor puis Sylvia sbastiani les gravures de Jean-Michel Morau le jeune qui accompagnent le texte ont renforcé encore cette image désolante de l’esclave Savage en invitant le lecteur spectateur européen à s’apitoyer sur leur sort misérable et à faire un retour critique sur sa propre culpabilité voyez par exemple cette gravure qui illustre

    Le le sort malheureux des esclaves enchaîné fouetté c’est à l’arrière-plan esclave fouetté réduit à se nourrir de cadavre d’animaux ici le cadavre d’un cheval ici encore c’est le spectacle de la souffrance qui doit émouvoir le lecteur et le convaincre mieux que des raisonnements de l’horreur de

    L’esclavage et vous voyez la la la la la phrase inscrite sous l’image ce qui sert à vos plaisirs et mouillé de nos pleurs alors Bernardin il reviendra à plusieurs reprises à la fois dans la fiction notamment dans Paul et Virginie dont on oublie parfois que ce n’est pas seulement une Bleuette exotique mais

    Qu’il contient aussi une dénonciation du colonialisme et de l’esclavage et sur un plan plus politique dans ses vœux d’un solitaire en 1789 dans lesquels il appelait les députés de la Constituante je cite à soutenir les femmes opprimées par les lois les enfants rendus misérables par notre éducation les paysans dépouillés

    Par les impôts les citoyens forcés au célibats les ser du monjura les de nos colonies ce discours ce discours n’était pas dans les années 1780 avant même la révolution on trouve par exemple une critique sans concession de l’esclavage chez condoret dans ces lettres sur l’esclavage des sur lesquels je

    N’ai pas le temps de m’arrêter aujourd’hui mais qui est marqué par un universalisme audacieux au nom de l’unité de l’humanité de l’égalité des droits bon je vous cite quand même les tout premiers mots les T premiers mots de l’épitre aux esclaves noirs qui ouvrent le livre et qui qui commence

    Ainsi quoi que je ne sois pas de la même couleur que vous je vous ai toujours regardé comme mes frères la nature vous a formé pour avoir le même esprit la même raison les mêmes vertus que les Blancs je ne parle ici que de ceux d’Europe car pour les blancs des

    Colonies je ne vous fais pas l’injure de les comparer avec vous si on allait chercher un homme dans les îles de l’Amérique ce ne serait point parmi les gens de chair blanche qu’on le trouverait alors pourz commenter plus longuement ce texte sur le le le le la question hein de la critique de

    L’esclavage par les penseurs français des lumières un bien éloigné des ponciifs sur les lumières esclavagistes je vous renvoie à la synthèse publiée en 2008 par Jean et RAR lumière et esclavage plus généralement c’est tout un courant des lumières plus important qu’on le pense habituellement qui critique dans le dernier tiers du 18e

    Siècle l’impérialisme et le colonialisme européen comme l’a montré par exemple SAR Mutou dans son livre Enlightenment against empire en s’appuyant sur les cas de didro de Herder et de Kant Mutou a montré que ces auteurs avaient articulé leur anti-impérialisme sur un universalisme fondamentalement pluraliste qu’est-ce

    Qu’il veut dire par là il veut dire que cet universalisme repose à la fois sur la conviction d’une commune humanité la bas au fond de l’universalisme mais aussi sur l’idée que l’être humain est un agent culturel et non un simple support de droit formel ce qui conduit à une troisème dimension le caractère

    Incommensurable des différentes sociétés et cultures autrement dit et plus simplement il est impossible de juger les unes avec les critères des autres alors voyez bien qu’une telle perspective est aux antipodes du discours de la civilisation que j’ai décrit la semaine dernière dans lequel les différentes sociétés s’ordonnent sur l’échelle du progrès des

    Meœurs ou sur la grande carte de la civilisation dont le centre et l’Europe française pour ma part j’ajoute que l’universalisme anti-impérialiste ou anti-esclavagiste s’exprime le plus souvent en partant d’une situation de dénonciation c’est le point sur lequel je voudrais insister à travers un discours qui ne se contente pas de

    Pronon de professer des principes mais qui mett en scène des situations réelles ou fictives des situations de violence et d’injustice et ça c’est un des ressorts majeurs de l’appel à l’universel c’est pourquoi je l’appelle universalisme critique parce qu’il est lié à une expérience au spectacle du malheur et

    Qu’il drive toujours de la description et de la critique d’une situation injuste il s’agit dans tous les cas de retourner les principes universaliste contre les Européens en montrant que ceux-ci n’en sont pas dignes qu’il les trahissent dès lors qu’on regarde le monde même de façon fictive depuis le

    Point de vue de l’autre alors c’est le cas en particulier de plusieurs textes de didro qu’il s’agisse du Supplément au voyage de bouinville ou de ses contributions à l’histoire philosophique des deux Indes dans lesquelles il s’attache à condamner les ravage du colonialisme européen avant d’en appeler ouvertement à la révolte par exemple

    Évoquant les violences commises par les Portugais en Asie il s’écrit barbares européens l’éclat de vos entreprise ne m’en a point imposé leur succès ne m’en a point dérobé l’injustice je me suis souvent embarqué par la pensée sur les vaisseaux qui vous portez dans ces contrées lointaines mais

    Descendu à terre avec vous et devenu témoin de vos forfaits je me suis séparé de vous je me suis précipité parmi vos ennemis j’ai pris les armes contre vous j’ai mes mains dans votre sang voyz par cette expérience de pensée assez saisissante didro se fait témoin visuel témoin des exactions coloniales et cette

    Expérience même fictive le conduit à imaginer une violence vengeresse la prise d’armes pouvant être lu aussi comme une métaphore de la prise de plume comme une figure du combat intellectuel et littéraire contre les abus de la colonisation européenne c’est-à-dire comme une autocritique de l’Europe mais l’image des mains dans le sang est tellement

    Forte qu’elle impose un imaginaire de la révolte de la révolte violente celle des opprimés eux-mêmes c’est la logique à laquelle didro et rénal sont conduits dans le passage célèbre qui évoque les communautés de noirs fugitifs les marron et prophétise l’arrivée d’un chef courageux un nouveau spartacu levant l’tandard l’tandard sacrés de la liberté

    C’est dans le texte et conduisant les esclaves à la vengeance et au carnage alors ce sont ce sont là des textes importants mais on aurait tort pour autant de réduire la critique de l’esclavage aux écrits des hommes de lettre européens en France l’abolitionisme ou plutôt l’anti-esclavagisme comme il faudrait

    L’appeler parce qu’il ne se ne conduit pas toujours à une action effective en faveur de l’abolition apparaît ben cette cette c c antiesclavagisme apparaît vraiment dans les années 1770 même si on en trouve évidemment des éléments auparavant en revanche le mouvement est plus ancien en Amérique du Nord où il s’est développé

    Dans le milieu quaker de Pennsylvanie dès la fin du 17e siècle dans les années 1730 1740 il connaît un certain essort autour de personnages Ricus et marginaux héritiers des idéaux égalitaires et puritains de la Révolution anglaise tel Benjamin leay qui avait découvert les réalités de l’esclavage à La Barbade et

    Que Marcus redcker a remis à l’honneur en lui consacrant une récente biographie mais dont il est difficile de de mesurer l’influence et la représentativité je parle de de Benjamin ley évidemment pas de la biographie en revanche à partir des années 1750 le mouvement prend une ampleur nouvelle marquée par une mobilisation

    Beaucoup plus large des Quakers qui Appell à affranchir leurs esclaves à tel point qu’en 1780 la Pennsylvanie votera la première loi d’émancipation graduelle des esclaves une des figures les plus les plus Mar les plus marquantes de cette génération de quakers étant Tony benzé un quaker d’origine hugnot il est né en

    1713 à sa qutin dans une famille protestante vivant tant bien que mal sous une façade catholique ses parents ont ensuite quitté la France pour Rotterdam lorsqu’il avait 2 ans puis se sont installés à Londres et enfin à Philadelphie en 1731 où ils sont devenus quakers ce qui était assez rare pour des

    Calvinistes français comme l’a montré Bertrand V rumbeck qui a reconstitué avec soin l’itinéraire Atlantique de cette famille Anthony benzé publie à partir de 1760 une série de panflets à destination de l’opinion publique centrée sur la dénonciation de la traite atlantique de ses conséquences sur l’Afrique et des horreurs de l’esclavage aux Antilles

    Cette logique l’amène à valoriser l’image des sociétés africaines qu’il présent sous un jour très favorable en s’appuyant sur de nombreux récit de voyageurs le plus plus important de ces PF publié en 1771 et d’ailleurs le dernier de la série il est intitulé some historical account of Guinea histoire une histoire de la

    Guinée il a connu un grand retentissement en Angleterre et il existe désormais une traduction française très bien à noté publié en 2017 alors pour nous l’intérêt de ce texte c’est qu’il cite à la fois donc il est écrit aux États-Unis par un quaker

    De de P van et il cite à la fois des philosophes européens notamment montesqueux qui est évoqué comme une autorité incontestable et bien sûr la Bible à l’appui cette fois d’un universalisme évangélique par exemple job 3114 n’est-ce pas le même Dieu qui nous a modelé eux comme nous dans le ventre de sa

    Mère le résultat comme l’a montré David Crossby c’est que benzé en vient ainsi à c’est la formule de de de l’historien David Crossby il en vient à séculariser l’argumentaire quaker à l’inscrire dans un récit historique notamment le récit de l’histoire de l’Afrique et de la traite et dans un discours philosophique

    Qui va donner sa forme particulière à l’abolitionnisme britannique mélange d’universalisme éclairé et de sentiments religieux et de fait benzé a exercé une grande influence sur le mouvement abolitionniste anglais et notamment sur ces deux principales figures que sont qui était Granville sharp et Thomas Clarkson qui ont dans les années 80

    Entamé une grande campagne d’opinion qui aboutira à l’abolition de la traite en 1807 en France benzette n’est pas non plus un inconnu par exemple brisso qui vous le savez cré avec d’autre la Société des Amis des Noirs en 1788 et bien brisso cite toujours benzé et s’est panflé euh comme avec beaucoup d’éloges

    Le fondation des Amis des Noirs en 1788 un an auparavant en Angleterre la campagne britannique pour l’abolition avait lancé ce qui allait devenir un de ses plus importants symboles de ces plus grands symboles le médaillon le médaillon de de céramique produit par wwood en 1787 représentant pardon

    Un ah je l’ai pas mis bon tant pis représentant enfin vous le connaissez bien il représente un esclave enchaîné avec le slogan am not a man and a brother ne suis-je pas un homme et un frère affirmation simple et pathétique d’un idéal de fraternité et d’humanité le terme de frère ici ne

    Renvoie pas un langage civique de la fraternité républicaine mais au vocabulaire chrétien utilisé inlassablement par les abolliitionnistes Anglais et notamment Granville sharp don je vous parlait il y a un instant qui ne cessait dans ses écrits dans ses panflets dans ses textes ne cessait de mettre en avant le motif évangélique du

    Bon Samaritain et la nécessité de traiter tout être humain comme un frère au nom de l’amour de Dieu le motif le motif graphique jeis vraiment désolé de pas pas vous l’avoir mis mais je pense que vous l’avez vous pouvez voilà le le visualiser vous l’avez en tête le motif a connu un

    Succès important adapté sur tout types de support dans plusieurs langues dans plusieurs formats son adaptation donnera justement le saut de la Société des Amis des Noirs en France et on remarque que la position de l’esclave à genoux tendant les bras au ciels entre la prière il est enchaîné

    Donc il tend les bras au ciel entre la prière et la supplication renvoie à un imaginaire chrétien mais aussi à une forme de soumission comme si la libération ne pouvait venir que de la Miséricorde des maîtres blancs et ou de la de la bienveillante Angleterre pourtant de l’autre côté de

    L’Atlantique dans le sillage des Quakers une nouvelle génération d’abolitionnistes apparaissaiit pendant la Révolution américaine et les premières décennies de la jeune république parmi lesquelles figurit plusieurs africains américains hein n’oubliez pas que plusieurs dizaines hein de milliers en fait de de d’Africains américains ont été affranchis ont été libérés au moment de

    La Révolution américaine dans le Nord dans les États dans les États du Nord on en compte près 180000 au début du 19e siècle alors ces figures sont aujourd’hui mieux connues grâce à de nombreux travaux qui mettent en évidence l’importance de leur combat et les inscrivent au sein du mouvement

    Évangélique porté par ce qu’on appelle le grand réveil le grand réveil religieux du protestantisme à partir des années 1740 en Europe qui gonnait un second essort aux États-Unis à la fin du 18e siècle et tout particulièrement chez les Africains américains avec l’explosion des églises baptistes et méthodistes un des cas les plus

    Importants pour rester à Philadelphie parce qu’on en trouve aussi à New York à Boston en tout cas pour rester à Philadelphie le cas le plus intéressant est celui de de Richard Allen qui a fait l’objet d’une d’une très belle biographie par Richard Richard Newman le grand spécialiste de ces abolitionnistes

    Noirs pour lesquels il a forgé la notion de Black fonders les pères fondateurs noirs et Richard Allen était né esclave en 1760 ayant acheté sa liberté il se convertit au méthodisme à 17 ans devient prédicateur et s’installe à Philadelphie il joue un rôle important à la fois dans la constitution d’une communauté religieuse

    Afro-américaine notamment en créant une église méthodiste Bethel à à à à Philadelphie qui va s’autonomiser des églises blanches va devenir la première église méthodiste noire autonome mais aussi pour son engagement dans la cause abolitionnisme il crée en 17 787 la Free African Society et en 1794 il écrit avec son ami Absalom Jones

    Un panflet panflet très vigoureux dans une situation assez tragique qui était qu’en 1793 il y avait une épidémie de fièvre jaune à Philadelphie les Noirs avaient été accusés alors qu’il s’étit beaucoup dévoués justement au au règlement sanitaire de la crise ils avaient été accusés d’en avoir profité accusation tout à fait

    Fait raciste et du coup Richard Allen et Absalon Jones ont publié un panflet pour faire justice de ces accusations et dans laquelle ils ont ajouté un un appel vibrant en faveur de l’abolition et de l’égalité raciale alors ce qui caractérise l’engagement de de de de Allen c’est un

    Mélange de moralisme chrétien et de théologie de la libération ce qui fait lui à la fois un réformateur des meurs et formateur des meurs de sa communauté et un défenseur infatigable de la cause des Noirs à la fois libre ou esclave alors dans ses écrits militants il

    N’hésite jamais et c’est ça qui est intéressant à évoquer son expérience de l’esclavage puisque lui-même a été grandi et né à grandi esclave ce qui lui permet contre le discours paternaliste des abolitionistes blancs d’affirmer que les peuples opprimés à commencer par les esclaves doivent être les agents de leur

    Propre libération parce qu’ils sont les mieux placés pour comprendre les effets de l’esclavage la critique de la domination esclavagiste ne se fait pas seulement au nom d’un discours théorique des droits mais sur la base d’une d’une expérience vécue de la domination et c’est ce qui distingue Allen des des

    Abolitionnistes de la période de la guerre d’indépendance qui fondaient plutôt leur discours sur le droit naturel et les promesses venues de la déclaration d’indépendance il s’adresse à la fois à la raison en en affirmant l’égalité des aptitudes intellectuelles et morales et à la foi en rappelant que Dieu dans l’Ancien Testament fut le

    Premier à dénoncer l’esclavage refusant toute violence il prend modèle sur je cite le doux et humble Jésus modèle de toutes les vertus et appelle ses frères à ne ressentir y compris vis-à-vis des esclavagistes ni animosité ni amertume et là je suis une traduction un passage du texte que vous vous pourrez trouver

    C’est l’occasion de la citer dans la très remarquable antologie de la pensée noire publiée très récemment par mariejun Rossignol Michael Roy Marline D et Cécile Roudeau qui est un un recueil précieux de texte qui montre l’importance tout au long du 19e siècle d’une tradition intellectuelle issue des révolutions atlantiques et marqué par

    Les échanges transnationaux entre les États-Unis et Haïti alors nous y reviendrons en mars quand nous aborderons la révolution de Saint-Domingue mais il faut relever que ce courant de pensée que Charles Mills et plus récemment Magalie Besson ont proposé d’appeler les lumières noir s’en racine dans une expérience de la

    Subordination raciale et de la discrimination ou pour le dire peut-être plus justement dans une expérience marquée à la fois par la discrimination et par la présence d’un discours égalitaire des droits donc au cœur de la contradiction même de la modernité ces lumières noires t qu’ell s’expriment au

    Tournant des 18e et 19e siècles ont donc été obligés de retourner le stigmate en fierté et de trouver d’autres ressources pour penser l’émancipation que le discours strictement juridique des droits elle retrouve ainsi la question du paria au cœur des contradictions de la modernité et n’est pas anodin que William dubys le grand sociologue

    Américain noir du début du du 20e siècle qui est en quelque sorte l’héritier de toute cette pensée et de ces lumières noires et bien que William du BO disait ce sentir paria et étranger dans sa propre maison il n’est pas anodin non plus qu’une grande figure de la pensée africaine contemporaine comme le

    Philosophe camerounais Fabien ebousi Boulaga qui est mort en 2018 qui était un ancien Jésuite donc à la fois philosophe et théologien et bien qu’il est repris à Anna arent le thème du paria conscient pour penser le statut de l’intellectuel africain dissident dans une situation post-coloniale ces lumières noires d’ailleurs n’étaient pas exclusivement

    Masculines elennie varicas ouvre d’ailleurs son livre Les rebut du monde sur le cas de Philis whley cette esclave et poètesse noire qui a connu un succès littéraire à Londres au milieu des années 176 70 suscitant l’adhésion du public et sur lesqueles je reviendrai parce qu’il y a beaucoup de travaux

    Actuels autour autour d’elle notamment une biographie récente plus tard au milieu du 19e siècle Flora Tristan qui était à la fois écrivaine militante socialiste et féministe a inlassablement rapproché la situation des femmes de la situation du paria en publiant par exemple les pérégrinations d’une paria ou en écrivant à Victor Considérant grand je

    Cite un jour les parias seront admis au grands banquet de l’humanité or et je vais terminer par là cette représentation de la femme en paria d’une situation d’une société patriarcale et bien on la trouve déjà à la fin du 18e siècle chez germain de Stal commentant la chomière indienne de

    Bernardin elle écrit en 1796 dans de l’influence des passions sur le bonheur des individus je ne sais rien de plus profond en moralité sensible que le tableau de la situation du paria de cet homme d’une race maudite abandonné de l’univers entier faisant horreur à ses semblables sans l’avoir mérité par aucune faute

    Enfin le rebut du monde à ce stade elle rapproche vous l’entendez le paria non pas de la femme mais de l’homme sensible qui lui aussi est d’une race proscrite on on ne le comprend pas ces sentiments l’isoent des autres il est perpétuellement blessé insatisfait tenu

    À distance mais 4 ans plus tard dans de la littérature 1800 elle précise la comparaison en visant particulièrement cette fois la situation des femmes autrices soumises à l’eauprre public abandonné de tous pour peu que l’une d’entre elles monte du talent dit-elle l’opinion s’acharne sur elle je cite

    On l’abandonne à ses propres forces on la laisse se débattre avec la douleur elle promène sa singulière existence comme les parias de l’Inde entre tout entre toutes les classes dont elle ne peut-être toutes les classe qui la considère comme devant exister par elle seule objet de la curiosité peut-être de

    L’envie et ne méritant en fait que la pitié non j’ai pas tout à fait terminé pardonès je voulais terminer je je me suis jeis m’arrêter sur cette sur cette citation frappante non je voulais quand même dire tout dernier mot si vous me le permettez quand germain de Stal écrit

    Écrit ses lignes évidemment par rapport à à à un certain nombre de textes que j’ai cité au préalable la révolution est passée par là euh donc l’écrivain fait le bilan fait le bilan d’ d’une expérience et d’une situation qu’elle a bien connue qui était celle des femmes

    De lre dans la France d’Ancien Régime mais elle fait aussi écho à une situation nouvelle celle d’une situation paradoxale que la Révolution a faite aux femmes en affirmant l’universalité des droits tout en les excluant de leur exercice nous voilà donc arrivés vous l’avez compris au point d’articulation

    Peut-être au point de bascule entre les Lumières et la Révolution et c’est ce qu’il nous faudra aborder dès la semaine prochaine je vous remercie [Musique]

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